C. 02 : Noël, 25|12 : UNSER MUND SEI VOLL LACHENS, BWV 110

C. 02 : Noël, 25/12 : UNSER MUND SEI VOLL LACHENS

C. 02  1er jour de NOËL, 25.12
           1. Weihnachtstag, 25.12  (Wustmann)

          UNSER MUND SEI VOLL LACHENS,   BWV  110

                   NOTRE BOUCHE D’UN GRAND RIRE

NOTES quant à la Cantate

Auteur du livret :inconnu                        Date: 1725, mardi 25/12

Lectures bibliques de la fête :

Epître :       Tite 2/11-14 : la grâce salutaire de Dieu a paru
            ou   Esaïe 9/2-7 : un enfant nous est né
Evangile :    Luc 1-14 : la naissance du Christ et l’annonce aux bergers

THEME de la cantate :  

        Le plan est donné par trois citations bibliques. Chaque verset est développé dans l’Aria qui le suit.

        1. Psaume 126/2-3, sur la joie de de ceux qui reviennent de l’exil, devenu le Psaume des défunts au dernier dimanche de l’année de l’Eglise, dit dimanche de l’éternité : la venue du Christ nous fait sortir de l’exil de ce monde et fait de nous des enfants du ciel, « Himmelskinder », comme il est dit à la fin de la 1ère Aria. « Dieu a fait des merveilles », dit le Psaume, ce que nous voyons maintenant dans la crèche. La 1ère Aria développe cette œuvre de Dieu, « Was Gott getan ».

        On trouve dans la 1ère Aria la thèse théologique de « Er (Gott) wird Mensch – Il (Dieu) devient homme », qui n’est pas biblique, car dans la Bible le Verbe de Dieu s’incarne, Jean 1/1-14, et non pas Dieu. Cette thèse provient du Moyen-Age et de la thèse nicéenne de la divinité identique du Père et du Fils : le dieu qui en Christ, « Dieu né de Dieu,vrai Dieu né du vrai Dieu » s’incarne. « Propter nos et propter nostram salutem … homo factus est – à cause de nous et à cause de de notre salut …il a été fait homme », dit le Nicaenum pour le Christ. Ce qui conduit à la formulation écrasée : « Dieu devient homme », que l’on comprend de façon erronée, en laissant croire que Dieu, c’est-à-dire le Père, devient homme, ce qui dans le christianisme est impossible. On trouve cette formulation dans beaucoup de cantiques de Noël médiévaux, puis protestants. Le chant de Paul Gerhardt de 1653 «  Fröhlich soll mein Herze springen » dit : « Gott wird Mensch, dir Mensch zugute – Dieu devient homme, dans ton intérêt, homme. » Ce qui traduit exactement la phrase de Nicée-Constantinople citée plus haut.

        2. Le deuxième texte est de Jérémie 10/6,5 : « Dir Herr, ist niemand gleich – à toi, Seigneur, personne n’est égal », qui rappelle le « Mi –ka –El ? – Qui –comme – Dieu ? » du Psaume 40/6, et le chef énigmatique dont parle Daniel 10/13 et 21, « qui seul peut aider ». Ce chef a été interprété comme étant le Christ, ou/et l’archange Michel. Quoi qu’il en soit, l’idée que Dieu est unique et que ses œuvres uniques le prouvent, comme celle de la naissace du Christ, est la base de la 2ème partie. Mais ce Dieu « in-comparable » n’est pas un Dieu lointain : il se préoccupe du salut du « fils de l’homme – Menschenkind » perdu, dont il veut faire un « Himmelskind – un enfant des cieux ». La 2ème Aria est une magnifique évocation de cette perdition de l’homme, qui rappelle certaines confessions des péchés qu’on trouve dans les livres des 16e et 17e Siècles. 

        3. La troisième citation biblique est le « Gloria in excelsis » de Luc 2/14. L’exil est dépassé : Dieu, qui est loin dans les cieux très hauts, vient chez nous et apporte la paix par le Christ. La 3ème Aria reprend le thème de la joie du chœur d’entrée : qu’on se réveille du sommeil, peut-être de celui des bergers avant que l’ange et l’armée des cieux leur parle. Deux belles images : Réveillez-vous, artères et membres », qui forment un parallèle avec « la bouche et la langue » du Psaume 126, et « andachtsvollen Saiten – cordes méditatives, ou attentives », préparez une louange. L’homme et l’instrument louent Dieu. La Bible ne parle pas d’instruments accompagnant le chant des anges, mais les peintres et les poètes en ont mis dans leurs œuvres, et Bach s’associe à cette tradition.  

        4. Le choral, 5ème strophe du chant très rythmé et éclatent de Kaspar Füger : « Wir Christenleut », résume le chant par un Alléluia et le « Gelobt sei Gott –Béni soit Dieu, qui a visité et racheté son peuple  », qui est le début du Benedictus, le Cantique de Zacharie.

        Cette formule de bénédiction est employée 11 fois dans les Psaumes, en relation avec l’œuvre de Dieu. On la retrouve dans les salutations apostoliques, en particulier celle de Paul dans I Corinthiens 1/3 : « Béni soit Dieu, le Père de notre Seigneur Jésus-Christ. » L’association de ces formulations liturgiques avec un Alléluia est caractéristique des offices de Noël.

        Le plan de la cantate est :

1ère partie           2ème partie            3ème partie          4e partie

Chœur :               Récitatif :               Duo :                    Choral
      Ps 126/2-3          Jér 10/6,5            Luc 2/14
1ère Aria              2ème Aria             3e Aria

Sources :   Wir Christenleut  Han jetzund Freud, str 5
                  Kaspar Füger 1592 (1521 Dresden – 1592 Dresden)
                  Mélodie : Dresden 1593

Bible :    Citation directe de trois versets :
              Psaume 126 /2-3
              Jérémie 10/6,5
              Luc 2/14

Voix :   ( S ) Soprano, ( A ) Alto, ( T ) Ténor, ( B ) Basse

Livres de cantiques cités : 

EKG 1951  Evangelisches KirchenGesangbuch Ekd Evangelische
                    Kirche Deutschlands, Eglise Protestante d’Allemagne
RA 1952    Recueil de cantiques de la Confession d’Augsbourg d’Alsace
                    et de Lorraine
EG 1995   Evangelisches Gesangbuch, EKD Evangelische Kirche
                    Deutschlands, Eglise Protestante d’Allemagne

Structure poétique : la mention figurant entre parenthèse et en italique, après le titre des différentes pièces, indique : 1°  par le chiffre romain, le nombre de vers dans le poème : VI par exemple signifie 6vers. 2° les chiffres arabes indiquent le nombre de syllabes dans le vers. Par exemple : 8 signifie vers de huit syllabes, avec fin masculine ; 9f signifie vers de neuf syllabes, avec fin féminine

Références :  

Wustmann, J.S. Bachs Kantaten-texte  1982,   page 9
Neumann, Handbuch der Kantaten J.S. Bach   
                                   1947, page 96; 1970, page 102  
Schmieder         ,   page
James Lyon, J.S. Bach, Chorals 2005,             page 59

TEXTE de la Cantate

                                        Structure poétique
               1.  CHOEUR        ( verset biblique )

«Unser Mund sei voll Lachens, /  und unsre Zunge violl Rühmens. /  Denn der Herr hat grosses an uns getan. » (Ps 126/2-3)

« Notre bouche d’un grand rire, /  notre langue de louange, /  Soient remplies :  ce que Dieu a fait est grand. »  (Ps 126/2-3)

               2.  1er ARIA         ( T )         ( VI régulier )

Ihr Gedanken und ihr Sinnen,                 8f
Schwinget euch anjetzt von hinnen!         8f
Steiget schleunig himmelan                     7
Und bedenkt, was Gott getan!                 7
    Er wird Mensch, und dies allein,           7
    Dass wir Himmelskinder sein.              7

    Vous pensées et vous les âmes,
    Elancez-vous comme flammes,
    Montez vers les très hauts lieux,
    Méditez ce qu’a fait Dieu !
       Homme il est : de nous il veut
       Faire des enfants des cieux.

               3.  1er RECITATIF         ( B )         ( verset biblique )

« Dir, Herr, ist niemand gleich, du bist gross, /  und dein Name ist gross, und kannst’s mit der Tat beweisen. » (Jer 10/6,5)

« Rien, Dieu, ne t’est pareil, tu es grand, /  et très grand est ton nom, /  par ton œuvre tu le prouves. »  (Jér 10/6,5)

               4.  2e ARIA         ( A )         ( VI régulier )

Ach Herr, was ist ein Menschenkind,              8
Dass du sein Heil so schmerzlich suchest?     9f
Ein Wurm, den du verfluchest,                     7f
Wenn Höll und Satan um ihn sind;                 8
Doch auch dein Sohn, den Seel und Geist       8
Aus Liebe seinen Erben heisst.                      8

    Ah Dieu, qu’est donc un simple humain
    Que son salut autant t’inquiète ?
    Un ver, que tu rejettes,
    Quand Satan le tient en sa main.
    Aussi ton fils !  En son esprit
    Il se déclare enfant béni.

               5.  DUO   ( S,T )           (verset biblique)

« Ehre sei Gott in der Höhe /  und Friede auf Erden /  und den Menschen ein Wohlgefallen. » (Luc 2/14)

« Gloire à Dieu soit dans les hauts lieux /  et paix sur la terre /  et envers les hommes sa grâce. » (Luc 2/14)  

               6.  3ème ARIA       ( B )      ( VI régulier )

Wacht auf ! ihr Adern und ihr Glieder,       9f
Und singt dergleichen Freudenlieder,         9f
Die unserm Gott gefällig sein.                    8
    Und ihr, ihr andachtsvollen Saiten,        9f
    Sollt ihm ein solches Lob bereiten,        9f
    Dabei sich Herz und Geist erfreun.         8

    Allons, mes veines et mes membres,
    Chantez de joie, faites entendre
    Des chants qui sauront plaire à Dieu.
    Et vous, méditatives cordes,
    Pour le louer, vos sons s’accordent :
    Esprit et cœur soyez joyeux.

               7.  CHORAL       ( IV régulier )

Alleluia !   Gelobt sei Gott !                           4+4 = 8
Singen wir all aus unsers Herzens Grunde;             11f
Denn Gott hat heut   Gemacht solch Freud,     4+4 = 8
Der wir vergessen solln zu keiner Stunde.              11f

    Alléluia!    Louons le Roi !
    Chantons à Dieu du cœur honneur et gloire ;
    Car il nous a     Donné sa joie
    A tout moment gardons-en la mémoire !

                             Texte allemand : Wustmann, page 9
                             Trad. Française : Yves Kéler, Allevard, 14.6.2008