1er DIMANCHE APRES NOËL
TU DOIS, JESUS ENFANT
Du musst, o Jesulein
Mélodie : O Gott, du frommer Gott
I ou II
Heermann Johann
Exercitium Pietatis 1644
Luc 2/13-18, évangile du dimanche,
La fuite en Egypte
.
1. Tu dois, Jésus enfant,
Fuir en terre étrangère,
Et précipitamment,
Avec tes père et mère.
Et tu le fais pour moi,
Pour que j’aille avec toi
Dans la patrie de Dieu
Qui siège dans les cieux.
.
2. Pourquoi t’inquiètes-tu,
S’il faut quitter ta terre
A cause de Jésus
Et vivre la misère ?
Souviens-toi que ton Dieu
Se trouve en tout endroit,
Qu’il t’aide de son mieux
Pour adoucir ta croix.
.
3. Qui souffre ici la mort
Pour Christ et le confesse,
Vivra, venu au port,
Avec Jésus sans cesse.
Dieu se tient près de toi,
De toi il se soucie,
Quand tu deviens la proie
Du Diable, l’Ennemi.
.
Texte allemand
1. Du musst, o Jesulein,
Noch zart auf fremden Strassen.
Bist kaum geboren, und musst
Das Vaterland verlassen
Das tust du mir zugut,
Dass ich komm hin zu dir
Ins rechte Vaterland.
Du hast’s erworben mir.
.
2. Was trauerst du so sehr,
Wenn du um Christi Willen
Ins Elend wandern sollt?
Tu deinen Kummer stillen.
Gedenke, dass dein Gott
An allen Orten sei,
Und stehe dir mit Hilf
In deinem Kummer bei.
.
3. Wer allhie wird den Tod
Um Christi willen leiden,
Der wird auch leben dort
Mit Ihm (sic) in höchsten Freuden.
Gott ist bei dir, Gott sorgt
Für dich, wenn dich die Welt
Verjagt, ja wenn sie dir
Nach Leib und Leben stellt.
.
Texte Du musst, o Jesulein
Johann Heermann 1644
Exercitium pietatis 1644, p. 9
Dominica post Circulcisionem Domini,
Dimanche après la Circoncision du Seigneur =
2e dimanche après Noël
fr. : Yves Kéler, 29.9.2014 Bischwiller
Mélodie O Gott, du frommer Gott II
Regensburg (Ratisbonne)1675,
Meinigen 1693, 1854
RA 384, EKG 383, EG
fr. : Je suivrai Jésus-Christ
LP 253, ALL 44/10
O Gott, du frommer Gott I
Braunschweig 1648
RA deest, EKG 383, EG 495
fr. : Je veux répondre, ô Dieu
LP 246
Le texte
Str. 1 : Le texte est basé sur la fuite en Egypte, exposée dans la 1ère strophe. Christ quitte sa patrie et devient un exilé, pour que exilé dans ce monde, j’accède à la patrie de Dieu. Heermann emploie deux fois le mot « Vaterland –Patrie », mot à mot « pays du père ou des pères », mais la 1ère fois vise la patrie humaine : l’homme Jésus quitte Bethléem, patrie des ses pères, pour nous conduire à la vraie patrie céleste, « le pays du Père », soit Dieu. De fait, il fait un jeu de mots, qui passe bien en allemand, mais déjà plus difficile en français.
Heermann emploie le mot « Elend – Exil, misère », qui a les deux sens indiqués. « E-lend », primitivement, c’est « hors – ex-e du pays », qui a été remplacé dans le sens de l’étranger par « Aus – land –hors du pays. » Mais l’exil représentait aussi la misère et la douleur, d’où le 2e sens, resté seul en allemand moderne. Je pense que Heermann joue sur les deux sens du mot, encore compris de son temps.
Str. 2 :La consolation de l’émigré est qu’il retrouve Dieu ailleurs, et n’est donc pas lié à sa patrie pour sa foi. Il faut comprendre qu’à cette époque de persécution, les gens étaient souvent obligés de fuir dans une autre région, ou que certains s’en allaient parce qu’on les empêchait de pratiquer leur foi. Ils partaient pour retrouver Dieu ailleurs. Heermann a fait lui-même plusieurs fois cette triste expérience. Il caractérise cette épreuve par le mot « Kummer – Souci, Chagrin », qui indique la préoccupation : « sich darum kümmern – s’en occuper », en même temps que la douleur de l’âme. La souffrance n’est pas physique, mais spirituelle.
Ste. 3 : Ici on franchit un pas. Il ne s’agit plus de l’exil, mais de la mort. Qui meurt ainsi rejoint la patrie divine. C’est le monde, die Welt, qui « Verjagt – chasse », et qui « Nach Leib und Seele stellt – En veut à ton corps et à ton âme. » En fait ce sont les catholiques qui persécutent qui se cachent derrière le mot « Welt. » Peut-être Heermann veut-il relever le côté mondain et peu chrétien de l’agissement de l’Eglise romaine.
HERR
Heermann écrit HERR avec 4 majuscules. Ce titre écrit ainsi transcrit le tétragramme IHVH, Iahvé, qui désigne Dieu dans l’A.T. Il applique ce titre au Christ, puisque avec le Père et avec l’Esprit, il est de nature divine et Seigneur : « Dieu, né de Dieu, Dieu, Lumière né de la lumière », selon Nicée-Constantinople. Luther a déjà agit ainsi dans son « Ein feste Burg ist unser Gott – C’est un rempart que notre Dieu », où il appelle Jésus « der Herr Zebaoth – le Seigneur des armées », qui traduit l’hébreu « Iahvé Sabaoth – Iahvé des armées. » Dans sa Bible de 1534, Luther transcrit toujours l’équivalent de Iahvé par HERR, avec les 4 majuscules, d’après les substituts Kyrios – Dominus du grec et du latin. Heermann montre ici qu’il est un luthérien affirmé.
En revanche, Jesus ou Christ ne sont jamais en majuscules. De même les « Er –lui » ou « Du –Tu. » Le nom propre de Jésus, ou le titre propre du Christ = le Messie, n’expriment pas sa divinité. Seul son titre de SEIGNEUR – HERR le fait.
Cette graphie de HERR se trouve méthodiquement dans l’ensemble de l’Exercitium Pietatis.
Toutefois dans ce chant, une exception, à la strophe 3, où il est écrit « mit Ihm – avec lui », avec une majuscule. Erreur de typographe, habitué à mettre des majuscules à tout ce qui concerne la divinité ? Probable, puisque les autres pronoms dans le texte sont écrits en minuscules.
Enjambement
Heermann n’emploie pas ici l’enjambement, dont il est coutumier dans beaucoup de ses chants.
Répétition de certains mots-clés
Heermann répète volontiers certains mots dans ses chants. Tantôt le mot apparaît 2 fois dans la même strophe, tantôt il est répété de la 1ère à la 2e strophe.
Voir les deux mots répétés : « Vaterland » et « Kummer » signalés plus haut.