VENDREDI SAINT
TU AS PAYE EN CROIX
Du hast die Sünd am Kreuz
Mélodie : O Gott, du frommer Gott I ou II
Heermann Johann
Exercitium Pietatis 1644
Jean 19/17-22 et 38-42,
crucifixion et mise en terre
Thème : La mort du Seigneur
.
1. Tu as payé en croix
Pour mon péché horrible
Et adouci pour moi
La mort à l’œil terrible.
C’est toi qui as brisé
L’aiguillon de la mort.
Quand j’aurai tout laissé
Mon gain sera la mort.
.
2. Ne crains donc pas la mort :
Avec Christ tu vas vivre.
Mais remets-lui ton sort,
Confiant : il te délivre.
Car ma mort par sa mort
Est morte et sans pouvoir.
Christ apporte à mon corps
La vie et un espoir.
.
3. Tu as pris mon péché
Avec toi dans la tombe,
Pour qu’il soit couché
Et meure ainsi dans l’ombre.
Pourquoi donc m’inquiéter,
Si le Satan m’effraie :
Ma faute va rester
Au tombeau sans effet;
.
4. Depuis que dans ton corps
Tu fus, Christ dans la tombe,
Je ne dois à ma mort
Pas redouter son ombre.
Avec ton corps tu as
Consacré mon tombeau,
Pour que mon corps là-bas
Trouve enfin le repos.
.
Graduel
5. Par ma faute, à la croix,
SEIGNEUR Christ tu trépasses.
Tu as payé au bois
Pour moi et pour la masse.
Ta souffrance en ton corps
Ramène en moi la vie.
Ta mort détruit ma mort,
Crée mon nouvel habit.
.
Texte allemand
1. Du hast sie Sünd am Kreuz,
HERR Jesus Christ gebüsset,
Und meinen bittern Tod
Durch deinen Tod durchsüsset.
Des Todes Stachel ist
Durch deinen Tod dahin.
Sterb ich, so sterb ich dir,
Der Tod ist mein Gewinn.
.
2. Mensch, fürchte nicht den Tod,
Willst du mit Christo leben.
Du sollst vielmehr dich ihm
Gehorsamvoll * ergeben.
Der Tod durch seinen Tod
Ist tot und ohne Macht.
Das Leben für den Tod
Hat er dir wieder bracht.
* or. : gehorsamlich
.
3. Die Sünd hast, HERR Christ,
Mit dir ins Grab genommen:
Daraus sie nimmermehr
Ans Tagelicht soll kommen.
Was sorg ich dann so sehr?
Wenn mich der Satan schreckt,
So denk ich an dein Grab:
Da sind sie zugedeckt.
.
4. Weil du mit deinem Leib
Im Grab, Herr Christ *, gelegen,
So darf sich keine Furcht
In mir vorm Grabe regen.
Mit deinem Leib hast du
Geweihet mir das Grab,
Dass mein Leib seine Ruh
Vor allem Unglück hat.
* or. : sic
.
Graduallied
5. Für meine Sünd am Kreuz,
HERR Christ, bist du gestorben,
Hast Gottes Zorn gestillt,
Den Himmel mir erworben;
Dein schmerz- und schmählich Kreuz
Ist mein Ruhm, Ehr und Zier:
Dein Tod frisst meinen Tod
Und gibt das Leben mir.
.
Texte Du hast die Sünd am Kreuz
Johann Heermann 1644 Exercitium pietatis 1644, p. Die Parasceues , Jour de la Préparation = Vendredi saint fr. : Yves Kéler, 18.9.2014 Bischwiller Mélodie O Gott, du frommer Gott II Regensburg (Ratisbonne)1675, Meinigen 1693, 1854 RA 384, EKG 383, EG fr. : Je suivrai Jésus-Christ LP 253, ALL 44/10 O Gott, du frommer Gott I Braunschweig 1648 RA deest, EKG 383, EG 495 fr. : Je veux répondre, ô Dieu LP 246 |
Le texte
Le texte est une méditation de la mort du Christ sur la croix, à partir de la lecture de l’évangile du jour qui est Jean 19/16-30. La théologie classique de la mort sacrificielle est développée. Le rachat de mes péchés par la mort du Christ est rappelé plusieurs fois, en particulier par une forte répétition de mots forts (voir plus bas.)
Les images du texte
Heermann emploie plusieurs images d’origine biblique et de la tradition hymnologique antérieure.
La première image, dans la strophe 1, est celle de Saint-Paul : « O mort, où est ta victoire, ô mort, où est ton aiguillon » ( I Cor. 15/55.)
L’image de la mort du Christ qui dévore la mort humaine est employée dans la strophe 2. Elle provient du chant de Luther de 1523 « Nun freut euch, lieben Christen gmein – Mes frères, louez le Seigneur », à la strophe 8 : « Den Tod verschlingt das Leben mein – Ma vie(sacrifiée) engloutit la mort. » Et surtout du chant « Christ lag in Todes Banden – Le Christ reposait dans la mort », à la strohe 2 : « Es ist ein wunderlicher Krieg, … Es (das Leben) hat den Tod verschlungen… Wie ein Tode den andern frass – C’est une étonnante guerre… La vie a englouti la mort combat. » La même expression de « la mort / la vie engloutit la mort. » Et surtout celle de la mort du Christ qui dévore l’autre mort. Cette image provient elle-même d’Osée 13/14 dans sa forme latine de la Vulgate : « Ero mors tua, o mors – Je serai ta mort, ô mort. » Heermann, comme d’autres d’ailleurs, l’a reprise des deux chant de Martin Luther.
La 3e image est celle de la sanctification des tombes des chrétiens par le fait que le Christ était dans sa tombe. Le Christ mort a touché le sol du tombeau, et l’a de ce fait sanctifié. C’est une des origines de l’idée d’enterrer les fidèles dans une tombe ou un cimetière consacré. Dans le cantique pour la descente de croix et l’ensevelissement au vendredi saint « O Lamm, das meine Schuldenlast gertagen », de Johann Anastasius Freylignhause de 1702, str. 2, il est écrit : « Der fluch ist weg, die Erde ist nun rein, Zu Zeugnis des musst du begraben sein – La malédiction est enlevée, la terre est maintenant pure, Pour en témoigner il faut que tu sois enterré. » Plus loin, str. 8 : « Dein Grab macht meins zur süssen Lagerstädt – Ta tombe fait de la mienne un doux endroit de repos.“
La tombe ne me fera plus peur, car le Christ a emporté mon péché dans la terre, et il y restera, alors que lui, Jésus’ en sortira. Le rôle purificateur de la terre est souligné, idée très ancienne qu’on trouve déjà chez Aurelius Prudens Clemens, qui dit qu’il ne faut pas faire des mausolées de pierre, mais enterrer les corps en pleine terre pour qu’ils puisent être sanctifiés en vue de leur résurrection, conformément à Matthieu 27/52-53.
4 strophes + 1 = 5
Le chant est composé de 4 strophes qui forment une unité de sens, qui relèvent deux thèmes : la crucifixion et la mise au tombeau. La 5e strophe, séparée par une phrase en latin, est un résumé des 5 premières et semble devoir se chanter à part. Il fut considérer les 4 premières strophes comme un chant de méditation dur la mort et l’ensevelissement du Christ, et la strophe 5 comme une sorte de graduel.
HERR
Heermann écrit HERR avec 4 majuscules. Ce titre écrit ainsi transcrit le tétragramme IHVH, Iahvé, qui désigne Dieu dans l’A.T. Il applique ce titre au Christ, puisque avec le Père et avec l’Esprit, il est de nature divine et Seigneur : « Dieu, né de Dieu, Dieu, Lumière né de la lumière », selon Nicée-Constantinople. Luther a déjà agit ainsi dans son « Ein feste Burg ist unser Gott – C’est un rempart que notre Dieu », où il appelle Jésus « der Herr Zebaoth – le Seigneur des armées », qui traduit l’hébreu « Iahvé Sabaoth – Iahvé des armées. » Dans sa Bible de 1534, Luther transcrit toujours l’équivalent de Iahvé par HERR, avec les 4 majuscules, d’après les substituts Kyrios – Dominus du grec et du latin. Heermann montre ici qu’il est un luthérien affirmé.
En revanche, Jesus ou Christ ne sont jamais en majuscules. De même les « Er –lui » ou « Du –Tu. » Le nom propre de Jésus, ou le titre propre du Christ = le Messie, n’expriment pas sa divinité. Seul son titre de SEIGNEUR – HERR le fait.
Cette graphie de HERR se trouve méthodiquement dans l’ensemble de l’Exercitium Pietatis.
HErr
A la strophe 4, une variante de l’écriture de « HERR » : le typographe a écrit « HErr », avec deux majuscules et deux minuscules, faute de place à la fin de sa ligne de caractères en plomb.
Enjambement
Heermann emploie l’enjambement à la strophe 1 : « Der Todes Stachel ist / Durch deinen Tod dahin – L’aiguiilon de la mort est / Par ta mort parti. »
Répétition de certains mots-clés
Heermann répète volontiers certains mots dans ses chants. Tantôt le mot apparaît 2 fois dans la même strophe, tantôt il est répété de la 1ère à la 2e strophe.
Dans ce chant, Heermann emploie fortement la répétition. Le mot « Tod – Mort » apparaît 14 fois sur 5 strophes, ce qui est énorme ; le mot « Grab – Tombe » 5 fois. Le mot « Kreuz – Croix » est employé une fois au début de la 1ère strophe et une fois au début de la dernière. Le mot « Leib – Corps » 2 fois dans la même strophe 4.