EXAUDI
TU SAIS SEIGNEUR ET CHRIST
Du hasts gesagt HERR Christ
Mélodie : O Gott, du frommer Gott
I ou II
Heermann Johann
Exercitium Pietatis 1644
Jean 15/26 – 16/4, évangile du jour, Exaudi
L’Eglise dans l’attente
.
1. Tu sais, SEIGNEUR et Christ,
Combien nous hait le monde
Qui sur l’Eglise dit
Un jugement immonde.
Fais que jamais de toi
Je ne sois séparé
Et que grâce à ma foi
Ma vie soit couronnée.
.
2. Le monde, un monstre dur,
Contre les tiens s’acharne
Et met au pied du mur
Tous ceux qui t’appartiennent..
Mais les persécutés,
Dieu les prend en son sein.
Il sait les délivrer
De la main du Malin.
.
3. Furieux les ennemis,
Mais leur révolte est vaine.
Qui m’enlèvera, qui,
SEIGNEUR, de ta récolte ?
L’exil ou le mépris
Ne peut effaroucher
Celui qui te redit
Que tu es son berger.
.
4. Quiconque nous poursuit
Paiera dans la géhenne.
Le SEIGNEUR nous conduit
Vers une joie pérenne.
Qu’on nous pende et nous tue,
Ou qu’on nous brûle au feu,
Nous espérons que tu
Nous venges, notre Dieu.
.
5. Qui appartient à Christ,
Qui cherche aussi sa gloire,
Sera banni, maudit,
Mais gagne la victoire.
Nul tort ne nous atteint,
Puisque Dieu nous bénit.
Il nous prend par la main
Et nous amène à lui
.
Texte allemand
1. Du hast’s gesagt, HERR Christ,
Wie uns die Welt nachstellet,
Und über deine Kirch
Ein grimmes Urteil fället.
Ach hilf, dass mich von dir
Abwende keine Plag,
Auf dass ich dort bei dir,
Die Kron der Ehren trag.
.
2. Die Welt, das böse Tier,
Die Jünger Christi plaget
Und sie von einem Ort
Zum andern treibt und jaget.
Wen plagt und jagt die Welt,
Den nimmt Gott in sein Schoss,
Macht ihn von aller Welt
Verfolgung frei und los.
.
3. Die Feinde wüten sehr.
Doch ist umsonst ihr Schnauben.
Niemand kann mir dein Reich,
HERR Jesu Christe, rauben.
Kein Bann, kein Spott, kein Tod
Den Menschen von dir trennt,
Der von dir zeugt und dich
Vor aller Welt bekennt.
.
4. Wer uns allhier verfolgt,
Wird in der Hölle büssen.
Uns wird mit Freuden Gott
Das Kreuze dort durchsüssen.
So hänge, senge, brenn
Uns brat uns hier mit Schmach,
Wir hoffen Freud und dass
Gott’s Rache ziehet nach.
.
5. Wer Christum angehört,
Wer Christi Ehre suchet,
Der muss gebannet sein
Von Ketzern und verfluchet.
Doch dieser Fluch schadt nichts.
Gott segnet uns dafür,
Tut dem Verjagten auf
Des Himmels Gnadentür.
.
Texte Du hasts gesagt, HERR Christ
Johann Heermann 1644
Exercitium pietatis 1644, p. 32
Dominica Exaudi, Dimanche Exaudi
fr. : Yves Kéler, 23.10.13 Bischwiller
Mélodie O Gott, du frommer Gott II
Regensburg (Ratisbonne)1675,
Meinigen 1693, 1854
RA 384, EKG 383, EG
fr. : Je suivrai Jésus-Christ
LP 253, ALL 44/10
O Gott, du frommer Gott I
Braunschweig 1648
RA deest, EKG 383, EG 495
fr. : Je veux répondre, ô Dieu
LP 246
Le texte
Le chant illustre l’évangile, et se concentre sur l’évocation par Jésus de la persécution, dans 16/2-4. La persécution était le lot des protestants, et pendant la Guerre de Trente ans (1618-1648) elle a atteint beaucoup de territoires protestants. Heermann lui-mêm en a beaucoup souffert.
Dans la strophe 2, il relève la souffrance « Plagen – tourmenter », l’exil « Jagen – Chasser », « Bann – bannissement », et dans la strophe 4 les supplices « hängen, sengen, brennen, braten, gebannet, verjaget – pendre, griller, brûler, rôtir, banni, maudit » Le style est puissant et véhément, on sent la colère et même la volonté de vengeance, Rache, à la fin de la strophe.
Heermann ne désigne pas les persécuteurs catholiques comme tels, mais les appelle « die Welt – Le monde. » Il veut manifestement dire que cette Eglise romaine qui persécute n’est pas une Eglise, mais le « monde », dans le sens johannique de « univers mauvais », qui s’oppose à Dieu et à ses fidèles. Le jugement est féroce, autant que le jugement de cette Eglise-monde contre l’Eglise vraie : « die Welt… Und über deine Kirch Ein grimmes Urteil fället – Le monde… et prononce sur ton Eglise un jugement hargneux. » « Ton Eglise » est évidemment la luthérienne dont Heermann fait partie.
Il appelle aussi les persécuteurs « Ketzer – Hérétiques », visant ainsi la doctrine de l’Eglise romaine, fausse bibliquement et théologiquement, et qui justifie le meurtre des ennemis par des doctrines non bibliques, mais hérétiques.
L’ensemble de ce chant est un cantique de combat, dans la ligne de la Réforme de Luther et de ses successeurs.
HERR
Heermann écrit HERR avec 4 majuscules. Ce titre écrit ainsi transcrit le tétragramme IHVH, Iahvé, qui désigne Dieu dans l’A.T. Il applique ce titre au Christ, puisque avec le Père et avec l’Esprit, il est de nature divine et Seigneur : « Dieu, né de Dieu, Dieu, Lumière né de la lumière », selon Nicée-Constantinople. Luther a déjà agit ainsi dans son « Ein feste Burg ist unser Gott – C’est un rempart que notre Dieu », où il appelle Jésus « der Herr Zebaoth – le Seigneur des armées », qui traduit l’hébreu « Iahvé Sabaoth – Iahvé des armées. » Dans sa Bible de 1534, Luther transcrit toujours l’équivalent de Iahvé par HERR, avec les 4 majuscules, d’après les substituts Kyrios – Dominus du grec et du latin. Heermann montre ici qu’il est un luthérien affirmé.
En revanche, Jesus ou Christ ne sont jamais en majuscules. De même les « Er –lui » ou « Du –Tu. » Le nom propre de Jésus, ou le titre propre du Christ = le Messie, n’expriment pas sa divinité. Seul son titre de SEIGNEUR – HERR le fait.
Cette graphie de HERR se trouve méthodiquement dans l’ensemble de l’Exercitium Pietatis.
Enjambement
Heermann n’emploie pas ici l’enjambement, dont il est coutumier dans beaucoup de ses chants.
Répétition de certains mots-clés
Heermann répète volontiers certains mots dans ses chants. Tantôt le mot apparaît 2 fois dans la même strophe, tantôt il est répété de la 1ère à la 2e strophe.
Le mot « Welt – Monde » apparaît 4 fois, & fois dans les strophes 1 et 3, 2 fois dans la strophe 2. Dans la même strophe 2, les verbes « plaget – tourmente » et « jaget – chasse » sont répétés. Dans cette 2e strophe, 3 mots sont répétés, ce qui donne une puissance dans l’expression.