29. COMME IL EST BEAU, SEIGNEUR JÉSUS (trad) Wie schön ist’s doch, Herr Jesu Christ Mariabe, Mémorial du mariage, 20e Trinité

MARIAGE                                           N° 29
MÉMORIAL DU MARIAGE
20e dim après la Trinité

COMME IL EST BEAU, SEIGNEUR JÉSUS
          Wie schön ist’s doch, Herr Jesu Christ, Pr 1666/67

                  Trostgesang christlicher Eheleute –
         Chant de consolation d’époux chrétiens (E 1666/67)

                Ps 128, Livret de mariage de Luther

           Mélodie: Wie schön leuchtet der Morgenstern
                       Brillante étoile du matin

                                        XI 8.8.7f / 8.8.7f / 4f.4f, 4f.4f 8f

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A.   la joie du spectacle des mariés

1. Comme il est beau, Seigneur Jésus,

    Quand deux amants se sont élus 

    Et fêtent leur mariage !            

    Comme il est beau de voir tes dons 

    Venir par ta bénédiction                   

    Sur leur nouveau ménage !             

    Unis,  Bénis                                     

    Leur hardiesse,  leur jeunesse, 

    Leur promesse    

    D’être ensemble en toi sans cesse !

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2. Quand homme et femme sont unis,

    Ce qu’ils feront sera béni              

    Par leur amour fidèle.               

    Un grand succès leur est ouvert

    Et le bonheur leur est offert :    

    Le ciel les y appelle !               

    Douleur, Malheur,                    

    N’ont de prise,  ne divisent

    Ni ne brisent           

    L’élan de leur entreprise !      

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B.   le Christ, le Cantique des Cantiques

3. Dieu donne sa grâce avant tout 

    A qui attend de lui beaucoup:  

    A ceux qui en Christ s’aiment.

    Il tend sa main et chaque jour    

    Sur leur maison met son amour :

    Il est l’amour lui-même !           

    Allez,  Marchez,                         

    Intrépides :  Christ préside, 

    Il vous guide          

    Sur sa route, à pas rapides !  

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4. « Semblable à l’arbre est le mari, 

    Aux forts rameaux chargés de fruits »,

    Comme a dit le Cantique !                  

    « Telle une vigne aux beaux raisins   

    Qui donne en son temps du bon vin »,

    L’épouse est magnifique !                  

    Radieux,  Tous deux,                          

    Un bel homme,   Belle femme,

    Une flamme !    

    Dieu dit : « Ne soyez qu’une âme ! » 

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C.   l’institution,  les souffrances

5. Dans son amour pour les humains,  

    Dieu, au sixième des matins            

    Met fin à son ouvrage.                     

    Pour faire un seul être de deux,       

    Pour qu’homme et femme soient heureux,     

    Il fonde le mariage.

    Début,  Issue,                              

    Dieu les pose,  les dispose,

    Les propose :           

    « Je vous donne toute chose ! »

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6. Pourtant aussi, quelques douleurs,

    De la souffrance et des malheurs,  

    Viendront croiser leur route ;        

    Ils remettront leur sort à Dieu :     

    Ce bon Sauveur saura le mieux     

    Chasser ce qu’ils redoutent.          

    La paix  Renaît                              

    En silence !  La patience, 

    L’endurance,              

    Dieu les donne en sa clémence. 

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D.   Prière des époux

7. Viens, ô mon Roi, approche-toi, 

    Aide à porter le poids des croix  

    Et toutes les détresses !              

    Nous te rendons gloire et honneur,
    Tous deux, nous te chantons, Seigneur,

    Un chant plein d’allégresse !       

    L’amour,  Un jour,                       

    Loin des peines  Nous emmène,

    Nous amène       

    Au Royaume éternel. Amen.

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Texte allemand

Wie schön ist’s doch, Herr Jesu Christ,

Im Stande, da dein Segen ist,

Im Stande heilger Ehe !

Wie steigt und neigt sich deine Gab

Und alles Gut so mild herab

Aus deiner heilgen Höhe

Wenn sich  An dich 

Fleissig halten  Jung und Alten,

Die im Orden

Eines Lebens einig worden !

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Wenn Mann und Weib sich wohl begehn

Und unverrückt beisammen stehn

Im Bande reiner Treue :

Da geht das Glück in vollem Lauf ,

Da sieht man wie der Engel Hauf

Im Himmel selbst sich freue.

Kein Sturm,  Kein Wurm         

Kann zerschlagen,  kann zernagen,

Was Gott gibet

Dem Paar, das in ihm sich liebet.

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Vor allen gibt er seine Gnad

In derer Schoss er früh und spat

Sein hoch Geliebten heget.

Da spannt sein Arm sich täglich aus

Da fasst er uns und unser Haus

Gleich als ein Vater pfleget.

Da muss  Ein Fuss  

Nach dem andern  Gehn und wandern,

Bis sie kommen

In das Zelt und Sitz der Frommen

.

Der Mann wie einem Baume gleich

An Ästen schön, an Zweigen reich,

Das Weib gleich einem Reben,

Der seine Trauben trägt und nährt

Und sich je mehr und mehr vermehrt

Mit Früchten, die da leben.

Wohl dir,  O Zier,                      

Mannes Sonne,  Hauses Wonne

Ehrenkrone

Gott denkt dein bei seinem Throne.

.

Sei gutes Muts ! Wir sind es nicht,

Die diesen Orden aufgericht,

Es ist ein höher Vater,

Der hat uns je und je geliebt

Und bleibt, wenn unsre Sorg uns trübt,

Der beste Freund und Rater.

Anfang,  Ausgang

Aller Sachen,  Die zu machen, 

Wir gedenken,

Wird er wohl uns weislich lenken

..

Zwar bleibts nicht aus, es kommt ja wohl

Ein Stündlein, da man Leides voll

Die Tränen lässet schiessen ; 

Jedennoch wer sich in Geduld

Ergibt, des Leid wird Gottes Huld

In grossen Freuden schliessen.

Sitze,  Schwitze                     

Nur ein wenig !  Unser König

Wird behende

Machen, dass die Angst sich wende.

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Wohlher, mein König, nah herzu,

Gib Rat in Kreuz, in Nöten Ruh,

In Ängsten Trost und Freude.

Des sollst du haben Ruhm und Preis

Wir wollen singen bester Weis

Und danken alle beide,

Bis wir  Bei dir,

Deinen Willen  zu erfüllen,

Deinen Namen

Ewig loben werden. Amen.

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Texte :

Wie schön ist’s doch, Herr Jesu Christ
Paul Gerhardt 1666/67
Cr Si 159/47
RA 333, EKG 48, EG deest
fr. : Yves Kéler 1.8.07

Mélodie :

Wie schön leuchtet der Morgenstern
Philipp Niololai 1599
RA 61, EKG 48, EG 70
fr.: Brillante étoile du matin
LP 90
Oh ! quel éclat sur nos matins
NCTC 183, ARC 367, ALL 32/14

Texte avec mélodie : voir Tome II, N° 29


Le texte

La date de sa composition est incertaine. Il figure dans l’édition de 1666/67 des « Pauli Gerhardi Geistiliche Andachten. » Cranach-Sichart le caractérise comme « Gelegenheitsgedicht – poème de circonstance », comme deux autres chants de mariage de Gerhardt, l’un paru dès 1643, l’autre en 1666. Il existe aussi de Gerhardt une mise en chant de la « Louange de l’épouse » de Proverbes 31/10-10, en 19 strophes très fidèles au texte biblique, sous le nom de « Ein Weib, das Gott den Herren liebt – Une femme qui aime de Seigneur Dieu », daté de 1653. Ce qui donne un total de quatre chants de Gerhardt consacrés au mariage, dont seul celui qui nous occupe est parvenu à la notoriété dans les paroisses.

les chants des dimanches catéchétiques

Ce chant entre aussi dans la catégorie « chants catéchétiques » et « chants pour les dimanches catéchétiques ». Il est plus qu’un chant de circonstance pour un mariage dans le cercle d’amis du pasteur. Il contient un développement théologique et pastoral important.

Pour ces chants de catéchismes et de dimanches catéchétiques, voyez au chant précédent sur le baptême « O peuple, tu es baptisé – Du Volk, das du getaufete bist », le paragraphe explicatif.

les sources et l’acte à caractère sacramentel

Deux sources principales : la Bible et le « Traubüchlein – Livret de mariage » de Martin Luther.

1. Le psaume 128, qui fait avec le 127 un doublet concernant le mariage, la famille et les enfants. De là viennent les belles images de la strophe 4 : « Ta femme est comme une vigne féconde à l’intérieur de ta maison » Ps. 128/3a. A cette citation du Psaume est ajoutée celle du Cantique des cantiques 2/3 : « Comme un pommier au milieu des arbres, est mon bien-aimé au milieu des garçons. »

2. Le « Traubüchlein » est un formulaire formant la base des liturgies luthériennes pour le mariage pendant des siècles.Des fragments de ce texte sont repris directement par Gerhardt : str. 1 : « Die im Orden eines Lebens einig worden – ceux qui dans l’ordre d’une vie unique s’unissent » ; str. 6 : « Wir sind es nicht, Die diesen Orden aufgericht – Ce n’est pas nous qui avons érigé cet ordre (du mariage). »

3. Genèse 1 et 2 : l’institution du mariage comme un ordre (Orden) de la création, qui constitue l’état de mariage (Stand der Ehe), le « status matrimonii » : « Wie schön… im Stande, da dein Segen ist, im Stande heilger Ehe – Comme il est beau …dans l’état, qui contient ta bénédiction, l’état du saint mariage. »

Ce chant entre dans la catégorie des chants de mariage, en tant qu’acte pastoral à valeur sacramentelle, parce qu’ordonné par Dieu, confirmé par Christ, et affirmé par les Apôtres dans la clarté du Saint-Esprit. C’est pourquoi on y trouve des références, tantôt au Christ : str. 1 et 6, tantôt à Dieu : str. 2 et 3. L’Esprit est moins affirmé.

Contrairement au chant de baptême précédent, N° 28, ce cantique semble avoir été destiné à la célébration d’un mariage précis, ce que signale la mention : « chant de circonstance ». Il faudra l’employer premièrement dans cette fonction de chant pour le culte de bénédiction nuptiale. Son deuxième emploi est au dimanche de mémorial du mariage, qui se célèbre au 20e dimanche après la Trinité.

la souffrance et l’éternité

Deux thèmes récurrents chez Gerhardt. Comme tous les auteurs du temps, Gerhardt parle librement de la souffrance et de la mort, expérience ordinaire de chacun. Le mariage n’est pas le bonheur romantique et rêveur, mais la vie conjugale avec ses joies, ses tristesses, la maladie et la mort, celle des parents et des enfants. Mais la souffrance et la mort n’ont pas le dernier mot : Dieu aide et console dans la douleur (str 7). Et la mort conduit au Royaume. C’est pourquoi louons Dieu !

La fin du chant est en fait une prière des époux et reproduit la formule liturgique : « …von Ewigkeit zu Ewigkeit. Amen – …d’éternité en éternité. Amen. », dans le dernier vers « Deinen Namen Ewig loben werden. Amen – Au Royaume éternel. Amen. » Ce qui explique, dans le texte français, que l’avant-dernier vers et le dernier riment en « mène » et « Amen », au lieu que l’avant dernier vers ait, comme ailleurs, une triple rime interne.

les références à « Wie schön leuchtet der Morgenstern » : texte et mélodie

Le cantique de Philipp Nicolaï « Wie schön leuchtet der Morgenstern – Comme brille l’étoile du matin ! », de 1599, est à la base de celui de Gerhardt, qui en a repris l’incipit : « Wie schön ist’s – Comme il est beau », ainsi que la mélodie.

La strophe finale de Gerhardt est une synthèse des principaux thèmes et mots du chant de Nicolaï. En voici un tableau :

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Strophe 8 du chant de GerhardtEmprunts chez Philipp Nicolaïstrophes
(Nicolaï)
   
Wohlher, mein König, nah herzu,Mein König und mein Bräutigam    str. 1
Gib Rat in Kreuz, in Nöten Ruh,  
In Ängsten Trost und Freude.Lieb und Freude                             str. 3
Des sollst du haben Ruhm und PreisEr wird mich doch zu seinem Preis str. 7
Wir wollen singen bester WeisSinget,  Springetstr. 6
Und danken alle beide,Dankt dem Herren      6
Bis wir  Bei dir,In dir,  lass mirstr. 3
Deinen Willen  zu erfüllen,  
Deinen Namen  
Ewig loben werden. Amen.Ewig soll mein Herz ihn lobenstr. 5
 Amen, Amenstr. 7

La mélodie est celle du chant de Philipp Nicolai de 1599 et porte le nom du chant éponyme : « Wie schön leuchtet der Morgenstern – Brillante étoile du matin. »

Le chant de Nicolaï est devenu un cantique d’Épiphanie, décrivant le Christ dans sa splendeur, comme « Bräutigam », l’époux de l’âme. Or ce texte dérive du Psaume 45, qui est un Psaume de mariage royal de la maison de Juda, intégré dans le Psautier au même titre que les Psaumes d’intronisation royale, tels que le Ps 2, le 72 ou le 110. Plusieurs vers remontent au Cantique des Cantiques, d’autres à l’Apocalypse. Le chant décrit le Christ qui se montre comme le brillant Seigneur de l’Église, chamarré comme l’époux du Psaume 19/6 et du Cantique des cantiques. Ce Seigneur est apparu aux mages à l’Épiphanie et aux disciples à la Transfiguration. C’est pourquoi ce cantique est chanté à la fête de l’Épiphanie et au 1er dimanche qui la suit, ainsi qu’au dernier dimanche, le 6e , fête de la Transfiguration. La mélodie porte toutes ces significations.

Gerhardt a repris la splendeur et la joie de ce chant, à la fois pour le texte qu’il résume dans sa strophe finale, et pour la mélodie, car ils concordent avec les thèmes nuptiaux qu’il développe. Il a repris deux idées centrales du chant de Nicolaï : le Christ, appelé trois fois « König – Roi », et « Bräutigam – l’époux. » Chez Gerhardt, le titre de « König – Roi » apparaît deux fois, dans les strophes finales 7 et 8. Il a repris également les références au Cantique des Cantiques 2/3 : le pommier, et Psaume 128/3 : la vigne, qu’il cite à la strophe 4. En revanche, Gerhardt laisse le mot de « Bräutigam – l’époux », les mariés étant ici les « époux ». Mais tous les participants au culte du mariage connaissaient le chant de Nicolaï par cœur et sentaient toutes les références.