A 1. INTRODUCTION : Les éditions de 1785, 1796, 1839, Supplt. 1846, 1862

LES PSALMODIES MORAVES

     Editions de 1785 (3e ) , 11796 (4e), 1839 (5e),

                    Supplément de 1846

                      et Edition de 1862

Les éditions de 1785, 1796, 1839

J’ai comparé les éditions successives des Psalmodies moraves que j’ai pu atteindre sur Internet pour la fin du 18e s. et le 19e s.

1785 3e éd. A Basle (Bâle)
1796 4e éd. A Basle
1832 ? à Pontarlier ? exemplaire sans page de titre, renseignements : note manuscrite
1839 5e éd. A Lausanne

J’ai constaté que toutes ces éditions sont identiques, ont la même numérotation et donnent le texte d’une 1ère édition dont j’ignore la date, probablement au début ou au milieu du 18e s : 1743, selon Louange et Prière.

La difficulté est qu’on trouve mal ces livres, relativement faibles dans leurs tirages, les Frères n’ayant eu que des communautés plutôt petites à Paris, Nîmes, Le Locle, Montmirail et Genève, entre autres, ou dans leurs écoles à Paris et en Suisse. Peu de bibliothèques les ont. Les frères à Herrnhut en ont aussi dans leurs bibliothèques, mais il faut aller sur place pour les consulter, les saisies électroniques n’étant pas faites. 

Les frères avaient fait ces livres pour être en communion avec la communauté centrale de Herrnhut et pour chanter dans la langue locale ce qui s’y chantait, et sur les mêmes mélodies. La préface du Supplément de 1846 le dit. En sorte que, même si le tirage restait limité, cette intention était respectée. Je ne sais pas si les Frères ont traduit leurs chants dans d’autres langues que le français, mais c’est probable. La Centrale des Herrnhuter pourrait certainement répondre. 

Pour ce qui est des éditions plus récentes, il y en a eu jusque dans les années 1920, ensuite je ne sais pas. La bibliothèque des Frères de Königsberg dans la Forêt Noire possède un exemplaire de cette époque. 

Le Supplément de 1846

Ce supplément de 1846a été établi par Georg Heinrich Gottlieb Jahr, qui visait une nouvelle des Psalmodies, apparemment inchangées depuis 1743 jusqu’en 1839. Cette nouvelle édition date de 1862 (voir plus bas.)

Editions précédentes, signalées par Louange et Prière de 1938

De ces éditions de 1785 à 1862, onze chants ont été repris dans le Recueil Louange et Prière de la Fédération Protestante de France en 1938. Mais le plus souvent les textes ont été mutilés et corrigés, parfois avec bonheur. De ce recueil, plusieurs ont passé dans les Recueils plus récents, « Nos cœurs te chantent » 1979 NCTC, « Arc en Ciel » 1988 ARC et « Alléluia » 2005 ALL. Dans NCTC on a encore une fois modifié et amputé certains de ces chants, qui sont restés ensuite inchangés en 1988 et 2005, parce qu’il a été décidé par la Commission d’Hymnologie FPF qu’on ne reviendrait pas sur ces textes modifiés, pour ne pas froisser les « correcteurs » encore vivants, en sorte que les erreurs de traduction et de forme ont été officialisés et proclamés inchangeables. En revanche, on a continué d’abîmer d’autres chants ;

Si on relève les mentions de LP, on trouve citées diverses éditions du 18e Siècle, ainsi que le Supplément de 1846. En voici le tableau :

  99  Voici l’enfant nous est né   ?  Supplt 1846 ?  
  104  Devant ta crèche prosterné    1766   
  119   Chef couvert de blessures  1757   
  123  O monde, viens, contemple   1785   
  131  Pour quel péché, Jésus  1785   
  138   Le Fils de Dieu, ce bon Berger  1766   
  140   Agneau de Dieu, tu te laissas meurtrir  1743   
  167   Esprit très saint, puissant souffle de vie   1747   
  199   O notre Dieu, Père tendre et fidèle   1745  Supplt 1846/II, n° 101  
  217   Soleil de justice, Jésus, bon Sauveur  1785 ?  Supplt 1846/II, n ° 22  
  288  O Jésus, soleil de l’âme  ?  Supplt 1846 ?

Si on se résume, LP fait apparaître les éditions suivantes : 1743, 1745, 1747, 1757, 1766. Celle de 1743 est probablement la plus ancienne et serait la 1ère édition. Celle de 1785 est donnée pour la 3e. Les 4 éditions de 1745 à 1766 qui s’intercalent et parmi lesquelles se trouve la 2e édition sont probablement des réimpressions de la 1e ou de la 2e édition.

Sources

Les Psalmodies semblent constituées de traductions de l’allemand, à l’exception peut-être d’un ou deux chants. Je n’ai pas pu tout identifier, car aucune indication d’origine ou de mélodie n’est donnée. Toutes ces traductions conservent, sauf rare exception, toutes les strophes des originaux allemands.

Prosodie

En revanche, la prosodie est fort mauvaise, sauf quelques cas isolés. On sent qu’il y plusieurs traducteurs, peut-être d’époques différentes, les uns nettement meilleurs, les autres très mauvais. Mais cela est très fréquent chez les poètes français protestants, qui ont souvent une culture technique poétique faible, comparée aux poètes profanes connus, et surtout aux auteurs originaux allemands. Ce n’est pas général, heureusement. Mais comme vous l’avez relevé, ce mépris pour la technique est voulu et fait partie de cette théologie, piétiste mais pas seulement, qui croit que la bonne volonté suffit devant Dieu.

Il existe un Supplément de 1846, publié par Georg Heinrich Gottlieb Jahr, un allemand installé en France et qui a beaucoup oeuvré pour les moraves de langue française. Ce Supplément prépare l’édition de 1862. Jahr écrit ceci en 1846 : « « Quant aux exigences de la langue et de la poésie françaises, nous avons dû nous contenter d’éviter les fautes grammaticales et les trop grandes infractions aux règles de la versification. Mais si nous nous sommes bornés là, et que nous ayons éloigné d’avance toute prétention littéraire, ce n’est point que nous considérions les beautés de la poésie comme nuisibles à l’édification, mais nous ne croyons pas non plus qu’elles y soient indispensables. Car, pourvu que notre cœur soit dans une disposition convenable, un langage plus ou moins poétique n’ôtera ni n’ajoutera rien aux bénédictions que nous attendons de la grâce du Seigneur. Ce que nous avons eu essentiellement en vue dans le choix de nos Cantiques, c’est qu’ils portassent le cachet de l’expérience chrétienne, et qu’il n’y eût ni dans les rimes ni dans les expressions rien qui pût choquer ou distraire même des âmes sérieuses et recueillies. » […] » (Supplément à la psalmodie de l’égl. des Frères, 1846, page VI )

Le Supplément de 1846, page VI de l’avant-propos, se réfère au pasteur J.J.Hosemann (1805-1886) comme correcteur. Hosemann compose correctement, mais il semble qu’il n’a pas eu une grande influence sur la forme des textes. Hosemann a laissé 2 chants dans LP, qui sont encore employés actuellement : « Le Sauveur est ressuscité » LP 147, NCTC 204, ARC 473, ALL 34/13, et « Levons-nous, frères, levons-nous » LP 160/161, NCTC et ARC deest, ALL 31/26.

Jahr minimise manifestement le problème. Peut-être, en tant qu’allemand, peut-être bien au fait des chants allemands, ne sent-il pas la langue poétique française et ne se rend-il pas compte des lourdes erreurs d’accent. Je connais un alsacien qui compose des poèmes allemands excellents, mais des français fort mauvais.

Quand on étudie dans l’A.T. le Psautier de l’A.T. et les poèmes des prédications des prophètes, on découvre un travail poétique important et fondamental. Car on n’offre pas à Dieu des choses médiocres. C’est le raisonnement des ignorants et des paresseux, qui ne veulent pas se donner la peine d’un travail exigeant. L’hymnologie française souffre de ce mal depuis le début du 19e siècle jusqu’aujourd’hui.

Le christocentrisme et le thème du sang du Christ

Les chants sont fortement christocentriques, à peine quelques chants pour le Père et l’Esprit, et encore, ils sont orientés vers le Christ. La citation de Pline n’est pas choisie au hasard : « Ils chantent des Cantiques à Christ comme à leur Dieu. » Jésus prend la place centrale et devient le Dieu actif. Forte accentuation du thème du sang du Christ et du corps sanglant, avec des images baroques du type « Embrasser le bras sanglant du Christ », ou « remettre l’enfant baptisé dans les bras sanglants du Christ. »

Les chants à strophe unique

Les Recueils contiennent beaucoup de chants d’une strophe, dont je ne sais pas l’usage. Un certain nombre est en rapport avec la Sainte Cène, dans laquelle ils étaient peut-être employés. Ces communautés, quoique luthériennes de théologie de base, ne pratiquaient pas la liturgie classique de la messe luthérienne. Les Eglises luthériennes de l’époque non plus de façon marquée. On employait beaucoup de strophes de chants, ou de strophes isolées, pratique qui revient actuellement dans le protestantisme français.

Notes

 Lettre de Mme Ilka Sommer, du 28 juillet 2014

(Mme Ilka Sommer est médecin homéopathique et fait des recherches sur Gottfried H.G. Jahr, allemand, lui aussi homéopathicien, en même temps que membre actif de l’Unité des frères) 

Je fais des recherches pour la biographie d’un frère moravre qui a vécu de 1839-1870 en France.  

Ce frère morave s’ appelle Georg Heinrich Gottlieb Jahr. Il n’a pas seulement vécu à Paris, mais il a fondé une petite société morave pour quelques années et il a dirigé avec sa femme (une Parisienne du nom Elisabeth Dolfus) une écolede jeunes filles. En plus Monsieur G.H.G. Jahr est aussi connu comme médecin homéopathe.

Pour les cultes et les soi-disants « heures de chanter » de sa petite société morave à Paris il a traduit (ou mieux: sa femme a traduit) des chants allemandes en français. Dans les lettres à ses confrères G.H.G. Jahr a parlé de ces traductions. Il les a envoyé des échantillons.
Dans une lettre du 15 may 1852 il a écrit à ses confrères:

« Der im Jahr 1846 von mir besorgte Supplementband,
welcher, mit dem kl. Auszug von 116 Liedern in Montmirail, Montau-
ban u. Paris das einzige in Gebrauch gegangene Schulgesangbuch war, konnte
nur als eine Vorarbeit zu einem späteren wirklich officiellen Gesangbuche gelten, ... »

Je suppose que ce dontl parle ce serait la PSALMODIE MORAVE (Supplément) 1846 vous indiquez sous les « Livres de Cantiques cités ».

29 juillet 2014 : réponse de Ilka Sommer, dans un échange épistolaire

(Mme Ilka Sommer est médecin homéopathique et fait des recherches sur Gottfried Jahr, allemand, lui aussi homéopathicien, en même temps que membre actif de l’Unité des frères)  

Cher Monsieur,

merci beaucoup pour votre réponse si prompte et détaillée!

J’ai trouvé chez books.google ce « Supplément à la psalmodie de l’égl. des Frères » de 1846, qui se compose de deux parties
1. Supplément à la psalmodie de l’Eglise des Frères (350 cantiques)
2. Cent seize cantiques tirés de la Psalmodie Francaise de l’Eglise des Frères (116 cantiques)

Quand je lis l’avant-propos je reconnais la façon de Jahr de s’exprimer et d’expliquer. Jahr a publié des diverses ouvrages pour l’homéopathie non seulement en allemande, mais encore en français. (Je les connais car je suis homéopathe moi-même.) A côté de ses ouvrages homéopathiques, Jahr publia en 1864- 1865 deux nouvelles traductions poétiques de textes de l’Ancien Testament.

MonsieurJahr a écrit de la nécessité d’une traduction nouvelle et il a remarqué qu’il a travaillé pour cela parce que « Unser altes franz. Gesangbuch läßt sich nicht in die Hände aller unserer Eleven geben, nochweniger in die ihrer Eltern, unter deren Gefolge sich oft offenbare Weltleute befinden, u. ich habe hier sogar in dieser Hinsicht sehr bittere u. ssmerzlicheErfahrungen gemacht, die mir gezeigt haben, wie vorsichtig wir in unsern Aus-drücken, namentlich im französischen seyn müssen, wenn wir nicht Gefahr laufen wollen, durch unsere eigene Schuld das Heilige dem Spotte Preis gegeben zu sehen. »