PENTECÔTE
LE COURS DE L’AN A RAMENE to
Beata nobis gaudia
attribué à St Hilaire de Poitiers (315-367)
1. Le cours de l’an a ramené
La joie sur tous les rachetés :
Ce jour, l’Esprit Consolateur
Vient sur les Douze emplir leurs cœurs.
2. Des langues posent, tout de feu,
La flamme du Sauveur sur eux,
Pour les emplir de ses discours,
Et faire chanter son amour.
3. Ils parlent toutes langues tous,
Des peuples venus de partout ;
L’Esprit les leur a révélées,
Pour prêcher le Ressuscité.
4. Le temps de Pâques est achevé
L’Esprit saint nous a préparé
Un temps de sanctification
Qui conduit à la rémission.
5. Fidèle et bon Dieu, nous prions,
Confiants en toi nous demandons :
Esprit saint, descendu des cieux,
Par ton amour règne en tout lieu.
6. Remplis de grâce, Esprit, nos cœurs,
Fais-en le Temple du Seigneur ;
Pardonne nos iniquités
Et donne la tranquillité.
7. La gloire au Père dans les cieux,
A Jésus-Christ, le Fils de Dieu,
Ressuscité, à l’Esprit saint
Le règne en tout jusqu’à la fin. Amen.
Texte Beata nobis gaudia
Hilaire de Poitiers ? 315-367
www. cathcom.org
frs : Yves Kéler 10.11.2008
Mélodie original grégorien
Mélodie possible : celles en IV 8.8, 8.8
Vom Himmel hoch
Erhalt uns, Herr
Vous, saints ministres du Seigneur, Ps 134
All Morgen ist ganz frisch und neu
Le texte latin, avec traduction littérale
1. Beata nobis gaudia
Anni reduxit orbita,
Cum Spiritus paraclitus
Illapsus est Apostolis.
Le cours de l’an a ramené
Pour nous de grandes joies,
Quand l’Esprit Consolateur
Est tombé sur les Apôtres.
2. Ignis vibrante lumine
Linguae figuram detulit,
Verbis ut essent proflui
Et cantantes fervidi.
Il porte la forme d’une langue
De feu d’étincelante lumière,
Pour qu’ils soient remplis de paroles
Et ardents en chantant.
3. Linguis loquuntur ommnium,
Turbae pavent gentilium,
Musto madere deputant,
Quos Spiritus repleverat
Ils parlent en langues de tous,
Les foules des nations sont surprises,
Estiment ivres de moût
Ceux que l’Esprit avait remplis ;
4. Parata sunt haec mystice,
Paschae peracto tempore,
Sacro dierum circulo,
Quo lege fit remissio.
Cela est offert dans la foi (en secret),
Le temps de Pâques étant achevé,
Par le cercle saint des jours
Dans lequel se fait la rémission par la loi.
5. Te nunc, Deus piissime,
Vultu precamur cernuo,
Illapsa nobis coelitus
Largine dona Spiritus.
Toi maintenant, Dieu très fidèle,
Nous te prions, le visage incliné,
Fais largesse des dons de l’Esprit
Tombés sur nous du ciel.
6. Dudum sacrata pectora
Tua replesti gratia :
Dimitte nostra crimina
Et da quieta tempora.
Tu as rempli de ta grâce
Naguère les cœurs saints.
Pardonne nos fautes
Et donne des temps calmes.
7. Deo Patri sit gloria
Et Filio, qui a mortuis
Surrexit, ac Paraclito
In saeculorum saecula. Amen.
A Dieu le Père soit la gloire,
Et au Fils, qui des morts
Est ressuscité, et au Consolateur
Aux siècles des siècles. Amen.
Le texte
L’année de l’Eglise est évoquée à la 1ère strophe et à la 4ème.
Str 1 : elle est présentée comme une course : « orbita », mot tiré de orbis, le cercle, compris ici comme le cercle du ciel, et aussi da la terre, donc l’univers, le monde. L’année de l’Eglise est en fait inscrite dans le cercle du monde et dans son mouvement, et se projette dans notre vie d’Eglise et notre vie personnelle.
Str 4. le deuxième terme employé est « circulus dierum sacrus – cercle saint des jours », dans un sens plus statique et technique. On y distingue le « tempus Paschae – le temps de Pâques », qui achevé amène à celui de la Pentecôte. On voit qu’ici les temps de l’année sont bien découpés : le temps de Pâques de 40 jours est clos, commence celui de la Pentecôte. Cela montre aussi que les trois grands cycles, Noël, Pâques et Pentecôte sont bien délimités à cette époque.
Le parler en langues et le parler de langues:
l’auteur emploie l’expression « linguis loquuntur ». C’est le terme technique que Jérôme emploie dans I Corinthiens 12/30 et 14/23, traduisant mot à mot « glôssaïs laloûsin », qui désigne le parler en langues. En grec, dans 12/30 l’ordre des mots est « glôssaïs lalousin », dans 14/23 il est « lalôsin glôssaïs ». Mais Jérôme place dans les deux cas le complément « linguis » avant le verbe. C’est cette forme de Jérôme qu’on trouve ici..
Mais l’auteur revient au récit de la Pentecôte de Actes 2, et greffe sur cette expression le génitif « omnium » : « Linguis loquuntur omnium », la faisant sortir du « parler en langues », et lui donnant le sens de « parler en les langues de tous ». On a exactement ici l’ambivalence du texte de Actes 2, qui fait allusion d’abord à une glossolalie, comprise par les « turbae gentilium – les foules des nations » (les juifs des nations, pas les païens), comme de l’ivresse : « ils sont pleins de vin doux ». Puis à une compréhension des langues véritables de divers pays.
Variante de la strophe 1 vers 4 : Effusit in discipulos.
Cette variante, donnée par certains manuscrits (cf Bibl. Cathédrale de Cologne, n° 1157), est grammaticalement mal reliée. Elle emploie « effundo » comme un verbe intransitif : « se répand », alors qu’il est transitif « répandre quelque chose ». la forme « Illapsus est Apostolis- tombé sur les Apôtres. » paraît plus juste : le verbe est au passif, lequel est à nouveau employé à la strophe 5, où il fait parallèle : « Illapsa nobis coelitus- tombés sur nous du ciel». La variante dit que l’Esprit vient « in discipulos –dans les disciples », avec mouvement, alors que le texte d’Actes 2/3 dit : « supra singulos eorum », également avec mouvement : le texte du chant rend mieux ce « supra » locatif par l’ablatif de lieu, sans moouvement, « Illapsus est Apostolis – tombé sur les disciples », là où ils sont. D’autre part, le mot « Apostoli –les Apôtres », et non pas « discipuli –les disciples », est employé par Actes 1/26, immédiatement avant le récit de la Pentecôte. Ces divers arguments me font penser que le texte classique du chant est l’authentique.
Cette variante ne présenterait pas d’intérêt à être citée, si Ritter ne l’avait pas rencontrée, semble-t-il, quand il fit sa traduction du chant. Il écrit en effet à la première strophe:
Quel heur nous ramène ce jour,
Où du Père et du Fils l’amour,
L’Esprit saint, combla de faveur
Les chers disciples du Sauveur.
Ritter aurait pu employer le mot « Apôtres », celui-ci ayant le même nombre de syllabes, trois, que « disciples ». Je pense que s’il a choisi « disciples », c’est qu’il l’avait dans son texte latin.
Pour le texte de Ritter, voir sous: L’Esprit saint comble de faveurs.