MEDITE EN PAIX COMMENT TON DIEU (trad) Baptême, Trinité, Justification to

BAPTEME
TRINITE
JUSTIFICATION

     MEDITE EN PAIX COMMENT TON DIEU to
      ou Dors donc, mon cher petit enfant 
           Nun schlaf, mein liebes Kindelein


      Mélodie : Nun sich der Tag geendet hat

1. Médite en paix comment ton Dieu  Dors donc, mon cher petit enfant,
    T’amène à son salut.                    Et ferme en paix les yeux,   
    Il est ton Père dans les cieux :      Car Dieu, ton Père tout-puissant,
    Il le fait par Jésus.                       Veut te garder des cieux.

2. Ton  Père  est Dieu, le Dieu d’amour,
    Dieu éternellement.
    Il t’a donné l’âme et le corps
    A travers tes parents.

3. En toi tu portes le péché
    Qu’hérite chaque humain.
    Mais Dieu, voulant te voir sauver,
    Transforme ton destin.

4. Il t’a offert  Jésus, son Fils,
    Mourant sur une croix,
    Qui descendit vers nous du ciel
    Pour accomplir la Loi.

5. Lui qui naquit comme un enfant
    Versa pour toi son sang.
    Son sacrifice est suffisant
    Devant Dieu tout puissant.

         Baptême : avant le baptême, str. 6 à 8

6. Entends ce que Christ t’a acquis,
    Frappé comme un pécheur :
    Le saint baptême, l’eau de vie,
    Qui coule de son cœur.

7. En lui tu es né de nouveau
    Par son sang répandu.
    Réconcilié est le Très-haut
    Par l’œuvre de Jésus.

8. Dieu te couronne de  l’Esprit    
    Dans sa fidélité.
    Il renouvelle en toi la vie,
    L’amour et la bonté.

9. Son ange marche près de toi,
    Te garde jour et nuit,
    Pour qu’il te mène sur la voie
    Qui te conduit à lui.

10. Il fait qu’aucun esprit mauvais
      Ne sen prenne à ta vie :
      Voilà le don que Dieu te fait
      En son Fils Jésus-Christ.

         Enfants : baptême d’enfant, après l’acte de baptême

11. Dieu te confie à tes parents
      Pour qu’ils te guident bien
      Et qu’ils élèvent leur enfant
      Pour lui et le prochain.

12. Jésus aussi, ton bon Sauveur,
      Veut être ton ami,
      L’Emmanuel, Christ et Seigneur,
      Ton frère pour la vie.

13. Espère en lui, petit enfant
      Et rends gloire à ton  Dieu,
      Comme a fait le Baptiste Jean,
      Le fils de Zacharie.

14. Que te bénisse le saint  Christ,
      Qu’il te garde en tout temps ;
      Que son saint nom et son Esprit
      Soient sur ta vie d’enfant.

15.  Amen, Amen, cela est vrai  ,
      Nous dit le  Saint-Esprit.
      Que Dieu te tienne dans sa paix
      Tout au long de ta vie.

         Texte        Nun schlaf, mein liebes Kindelein
                          Johann Matthesius1504-1564
                          Recueil de Colmar 1722-1766
                          AK alt Augsburgische Konfession 1871, n° 533
                          AK neu Augsburgische Konfession 1926, n° 668
                           Fr. : Yves Kéler, 20.09.2012, Bischwiller

         Mélodie    eigene : Nun schlaf, mein liebes Kinderlein
                          Strasbourg 1573
                          dans F.A.Ihme, Halleluja, 1873-75, n° 148
         proposée  Nun sich der Tag geendet hat
                          Adam Krieger 1667, Strasbourg 1851
                          RA 262, EG 478
                          fr. : Le Seigneur vient à la minuit
                          ALL 31/21

MATTHESIUS Johann(es), né en 1504 à Rochlitz (Saxe), en 1529 études de théologie à Wittenberg, en 1532 recteur de l’école latine de Joachimstal en Bohème, en 1540 nouvelles études à Wittenberg, « Tischgenosse – compagnon de table » de table de Luther (Tischreden – propos de table), premier biographe de Luther, en 1542 pasteur à Joachimstal, où il meurt en 1564.


Le texte

        Le texte est d’abord trinitaire, décrivant successivement l’œuvre du Père (str. 2-3), du Fils (str. 4-7) et de l’Esprit (str.8-10). La Trinité revient dans les trois strophes finales. C’est en fait un « Katechismuslied – chant de catéchisme », dans la tradition des chants de la Réforme à visée pédagogique. Ce chant résume bien la doctrine de Luther, dont Matthesius était un familier.

        Il est composé dans la forme littéraire d’une berceuse (str. 1, puis 11-15.) La première strophe dit :

         Nun schlaf, mein liebes Kindelein        Dors donc, mon cher petit enfant  
         Und tu dein Aüglein zu,                        Et ferme tes petits yeux,
         Denn Gott der will sein Vater sein;       Car Dieu veut être ton Père,
         Drum schlaf mit guter Ruh!                  Dors donc en bonne paix.

        Ce genre de chant fut très pratiqué jusqu’au début du 20e Siècle dans les Eglises luthériennes. Composé avant 1564, ce cantique a probablement par la suite été lié au Katechismussonntag du 6e Trinité, consacré au baptême. Après la mort de Luther en 1546, l’orthodoxie luthérienne a établi cette pratique des 6 « Katechismussonntage – Dimanches catéchétiques », qui passaient en revue les articles du catéchisme de Luher : les commandements, le Credo, le Notre Père, le baptême, la Sainte Cène et la table domestique. Cela a fait conserver ce chant dans les livres luthériens jusqu’au début du 20e Siècle. Dans le RA de 1952, il a disparu, les dimanches catéchétiques et la « Christenlehre – l’enseignement chrétien » des jeunes jusqu’à l’âge de 18ans étant tombés en désuétude.

Emploi du chant

        Le chant fait partie de la piété familiale, marquée par la prière du matin, de midi et du soir, qui fut une des bases des Eglises luthériennes, héritée de l’Eglise ancienne. Ici il prend la forme d’une berceuse. Est-il pensé comme un moyen d’enseigner la foi aux enfants ? Certaines strophes peuvent très bien être mémorisées par ceux-ci. En tout cas les strophes qui ne concernent pas directement les enfants peuvent servir aux adultes. Ces strophes peuvent aussi être chantées lors de baptêmes d’enfants.

L’eau coulant du côté du Christ et le baptême

        Str. 6 et 7 : cette thèse du sang et de l’eau qui coulent du Christ est ancienne, et a son origine dans la théologie et la mystique médiévale. Les sacrements ont leur source en Christ, celui du baptême dans l’eau coulée de son sein : « Die heilge Tauf … aus seiner Seite floss« , celui de la Cène dans le sang coulé et associé au corps crucifié, pour figurer le vin et le pain. L’idée de rapprocher le baptême de l’eau coulée du crucifié est probablement issue de Saint-Paul, qui écrit en Romains 6/3-11 :  » « Nous tous,  qui avons été baptisés en Christ, c’est en sa mort que nous avons été  baptisés. » Et le verset 6: « Notre vieil homme a été crucifié avec lui. » Deux images se combinent :

1.  être baptisé, c’est mourir dans l’eau qui prend symboliquement la place de la croix. En effet, nous ne pouvons pas être crucifiés physiquement comme le Christ : nous, simples humains, nous en mourrions, ne pouvant pas ressusciter comme le Christ. L’eau remplace  donc la croix : on peut descendre dans l’eau et en remonter vivant. Descendre, c’est le symbole de la mort, remonter c’est le symbole de la résurrection. C’est pour cela qu’on  immerge totalement le baptisé, pour simuler sa mort, puis sa  résurrection.

2.  cette eau du baptême, c’est Christ qui nous l’a donné par la blessure de son cœur aimant. Ce n’est donc pas une eau ordinaire, mais une eau sacramentelle. C’est pour cela que Luther joint à l’eau l’ordre de baptiser du Christ, l’institution du baptême, et dit «  Das Wasser ist nicht schlicht Wasser, sondern Wasser eingefasst in Gottes Wort. »

        La strophe 7 du chant élargit la source sanglante du Christ à toutes ses blessures, au nombre de 6 : la tête, le flanc, les deux mains, les deux pieds, «  Durch Christ Wunden rot – par les blessures rouges du Christ. » Dans cette énumération, l’allusion à l’eau coulée du sang disparaît au profit du seul sang, ce qui ramène à la thèse de base formulée dans I  Jean 1/7 : « Le sang de Jésus nous purifie de nos péchés », formulée à la strophe 5 : « Am Kreuz sein Blut vergoss – versa son sang à la croix. »

        Le cœur du Christ étant la source du salut et de la bonté du Christ, une autre image, qui n’est pas présente ici, s’est formée : se réfugier dans les blessures du Christ, en particulier celle de son côté. On trouve cette image dans plusieurs cantiques.

        Les images issues de la réflexion sur le baptême du chrétien et sur sa source dans le sang du Christ sont donc multiples.

La colère de Dieu et le sacrifice suffisant du Christ

        Une thèse fortement exprimée dans les chant est la mort satisfactoire du Christ. L’homme est né avec le péché originel, str 3 :

«  Und da du warst in Sünd geborn    Et comme tu es né avec le péché
    Wie Menschenkinder all                 Comme tous les enfants des hommes
    Und lagst dazu in Gottes Zorn        Et que tu étais sous la colère de Dieu
    Um Adams Sünd und Fall, »          A cause du péché et de la chute d’Adam,

        L’homme ne peut se sauver lui-même et trouver grâce devant Dieu, qui est animé de colère contre lui ne peut que lui donner la mort. La seule solution est que quelqu’un meure pour l’homme et à sa place : ce sera Jésus, le propre fils de Dieu, qui pourra s’identifier aux autres enfants de Dieu que sont les hommes. Christ naît pour cela, petit enfant, et mourra à la place et au bénéfice des hommes. Son sacrifice est nécessaire et en même temps suffisant : c’est ce qu’on appelle le sacrifice « satisfactoire » du Christ, il « satisfait » Dieu et les hommes.

Str. 5. Ein Kindlein klein ward er geborn,    Il naquit comme petit enfant,
          Am Kreuz sein Blut vergoss;              A la croix il versa son sang
          Damit stillt er seins Vaters Zorn,        Par ce moyen il calme la colère de son Père,
          Macht dich von Sünden los.                Te libère des péchés.
 
        Le ministère du Christ est réduit à sa naissance et à sa mort, conformément au Symbole des Apôtres : Il est né de la Vierge Marie, il a souffert sous Ponce Pilate, il est mort, il a été enseveli… » Le ministère d’enseignement et de guérison du Christ ne joue aucun rôle dans le sacrifice du Christ. Ce ministère apparaît plus bas dans le chant, à la strophe 11, où Jésus confie l’enfant à ses parents pour qu’ils l’élèvent chrétiennement. Mais là le cadre est celui du Saint-Esprit, dont l’œuvre commence à la strophe 8.

        Le chant évoque aussi la réconciliation avec Dieu par le sacrifice du Christ, selon la théologie de Saint-Paul : str. 7 « Versöhnt ist Gottes grimmer Zorn – réconcilié est la dure colère de Dieu. »

        Je n’ai pas pu rendre dans la traduction la force de ce thème dans l’original.

Les enfants Jésus et Jean-Baptiste
       
        Le rapprochement entre l’enfant qui naît et Jésus né petit enfant est une tradition ancienne, médiévale. Il apparaît à la strophe 4-5 « … half dir Aus aller Not. 5. Ein Kindlein klein ward er geborn – te fit sortir de toute détresse. 5; Il naquit un petit enfant. » On trouve le même rapprochement dans le cantique de baptême de Johannes Freder (1510-1562), un contemporain d’une génération plus jeune que Luther :

1. Ach lieber Herre Jesu Christ,              O bien-aimé Seigneur Jésus-Christ,
   der du ein Kindlein worden bist           Toi qui devins petit enfant    
   Von einer Jungfrau rein geborn,         
Né d’une Vierge pure,
   Dass wir nicht möchten gehn verlorn,  Pour que nous ne périssions pas,

2. Du hast die Kindlein nicht veracht’t,…
  2. Tu n’as pas méprisé les enfants. »

De même le rapprochement avec Jean-Baptiste enfant.

       Str. 12 et 13 : le poète joue sur les diminutifs : str. 12 : « Jesulein – petit Jésus » et, « Brüderlein – petit frère. » L’enfant Jésus devient le petit frère de l’enfant du chant. Str. 13 : « Kindelein – petit enfant » et « Söhnelein – le fils petit », en parlant de Jean-Baptiste : l’enfant en bas âge de Zacharie est proposé comme modèle de piété. Le rapprochement entre le Christ et Jean-Baptiste, son « parent », né 6 mois avant Jésus d’après Luc 1/26, est une belle image, remontant aussi au Moyen-Age et à la notion de Sainte famille élargie, la « tribu – Sippe » du Christ. La famille de l’enfant et lui-même sont intégrés dans la grande famille de Jésus. Dans le texte original de la strophe 13, que le Recueil de Colmar de 1722-66 donne, Jean-baptiste est appelé « Hänselein – petit Jean » et pas « Söhnelein – fils petit », qu’on a placé dans AK alt et neu. Dommage, c’est effectivement moins poétique.

La finale trinitaire du chant

        Les trois dernières strophes, 13, 14 et 15, sont placées successivement sous le Père et le Fils et le Saint-Esprit, la dernière débutant par le « Amen » de l’assemblée qui termine la bénédiction finale du culte : «  officiant : Que Dieu le tout-puissant et miséricordieux vous bénisse, le Père, le Fils, le Saint-Esprit. Assemblée : Amen » , dit une fois, ou chanté trois fois. Cette formulation cultuelle indique peut-être que le chant peut aussi servir dans un office de baptême.  

        La formulation « Amen, Amen. Ja, das ist wahr » rappelle la célèbre finale du chant « Vater unser im Himmelreich » de Luther en 1543, qui écrit :  « Amen, das ist, es werde wahr – Amen, cela est : que cela se réalise. » De même est rappelée la finale des 3 strophes du chant trinitaire de Luther de 1524 : « Gott der Vater wohn uns bei – Dieu le Père soit près de nous, » qui dit : « Amen, Amen, das sei wahr, so singen wir Halleluja – Amen, Amen, cela soit vrai, nous chantons donc Alléluia. »

La mélodie

        La mélodie ancienne du cantique, donnée par Ihme, est de « Strassburg 1573. » Est-ce l’originale ? Je ne sais. Elle est manifestement peu ou pas connue.  

        Je propose « Nun sich der Tag geendet hat », qui se trouve dans les livres actuels allemands et français et qui soutient bien le texte.


Texte original

1. Nun schlaf, mein liebes Kindelein,
    Und tu dein Aüglein zu,
    Denn Gott der will dein Vater sein;
    Drum schlaf mit guter Ruh!

2. Dein  Vater  ist der liebe Gott
    Und wills auch ewig sein,
    Der Leib und Seel gegeben hat
    Dir durch die Eltern dein.

3. Und da du warst in Sünd geborn
    Wie Menschenkinder all
    Und lagst dazu in Gottes Zorn
    Um Adams Sünd und Fall,

4. Da schenkt’ er dir sein’n lieben  Sohn  ,  
    Den gab in den Tod;
    Der kam auf Erd vom Himmelsthron,
    Half dir aus aller Not.

5. Ein Kindlein klein ward er geborn,
    Am Kreuz sein Blut vergoss;
    Damit stillt er seins Vaters Zorn,
    Macht dich von Sünden los.

6. Hör, was dir Christ erworben hat
    Mit seiner Marter gross:
    Die heilge Tauf, das selge Bad,
    Aus seiner Seite floss.

7. Darin bist du nun neu geborn
    Durch Christi Wunden rot;
    Versöhnt ist Gottes grimmer Zorn,
    Dein Schuld macht dir nicht Not.

8. Mit seinem  Geist  er dich auch krönt
    Aus lauter Lieb und Treu,
    Der in dein zartes Herzlein stöhnt
    Und machet dich gar neu.

9. Er schickt dir seine Engelein
    Zu Hütern Tag und Nacht,
    Dass sie in deiner Wiege sein
    Und halten gute Wacht,

10. Damit der böse Geist kein Teil
      An deinem Seelchen findt.
      Das bringt dir alles Christ Heil;
      Drum bist ein selig Kind.

11. Dem Vater und der Mutter dein
      Befiehlt er dich mit Fleiss,
      Dass sie dir treue Pfleger sein,
      Dich ziehn zu Gottes Preis.

12. Dazu das liebe Jesulein
      Gesellt sich dir zu sein,
      Will dein Immanuel auch sein
      Und liebes Brüderlein.

13. Drum schlaf, du liebes Kindelein,
      Preis  Gott den Vater  dein,
      Wie Zacharias Söhnelein,    (or. : Hänselein )
      So wirst du selig sein.

14. Der  heilge Christ  der segne dich,
      Bewahr dich allezeit;
      Sein heilger Nam behüte dich,
      Schütz dich vor allem Leid.

15.  Amen, Amen  , Ja, das ist wahr  ;
      Das sagt der  heilge Geist  ;
      Geb Gott, dass du von heut zu Jahr
      Ein gottselig Kind seist.