O JESUS QUE J’AIME, JESUS, BIEN SUPREME (rév) Amour du Christ, Dimanche Laetare, Consolation, Enterrement tt

AMOUR DU CHRIST
DIMANCHE LAETARE
CONSOLATION
ENTERREMENT

                                 O JESUS QUE J’AIME tt
                                   Révision de LP 289

                              Mél : Jesu, meind Freude
                                      O Jesus, mon frère


1. O Jésus que j’aime,                   = LP  str1
    Jésus, bien suprême,
    Source du bonheur,
    Verse en moi tes flammes
    Et remplis mon âme
    D’une sainte ardeur !
    Avec toi tout est à moi :
    Tu m’accordes ta présence
    Et ton assistance.

2. Contempler ta face,
    Ressentir ta grâce,
    C’est la paix de Dieu !
    Dans ta ferme alliance,
    Rempli d’assurance,
    Je me sens heureux.
    Avec toi tout est à moi.
   
Tu m’accordes ta présence,
 
   Ta magnificence

3. Au sein de l’épreuve,                 = LP str 2
    Ton Esprit m’abreuve
    D’un calme divin.
    En toi, mon asile,
    Mon âme est tranquille
    Et mon cœur serein.
    Avec toi tout est à moi.
   
Tu m’accordes ta présence :
    C’est mon espérance.
 

4. O Jésus, je t’aime :                     = LP str 3
    Au moment suprême,
    Prends-moi dans tes bras.
    Soutiens ma faiblesse,
    Change en allégresse
    Mes derniers combats.
    Avec toi tout est à moi.
   
Tu m’accordes ta présence :
    C’est ma délivrance.

                          Texte :         Bienheureux qui t’aime
                                                Charles Cuvier 1841
                                                LP 289
                                                rév :  Yves Kéler 1985

                              Mélodie :      Jesu meine Freude
                                                Johann Crüger 1653
                                                RA 351, EG 396
                                                fr. Bienheureux qui t’aime
                                                    LP 289, NCTC 266, ARC 610

Le texte :

a.  le texte de Cuvier :

        Le texte de ce chant dérive du célèbre  » Jesu, meine Freude  » de Johann Franck, de 1653, pour lequel Johann Crüger a composé la même année sa mélodie. Charles Cuvier, originaire du Pays de Montbéliard, était professeur à la Faculté de Théologie de Strasbourg, et a beaucoup travaillé pour l’édition de livres de cantiques français.

        Le texte du chant rend bien le climat de confiance en Jésus de l’original, ainsi que le caractère mystique du texte de Franck. On est dans le temps de la  » Jesu Frömmigkeit « , la  » piété de Jésus « , qui exprime le bonheur de l’âme unie à son Seigneur.

        Cuvier n’a pas fait une traduction littérale. L’original a 6 strophes, Cuvier en a 4. Cuvier fait du dernier tercet un refrain final, avec changement de la dernière ligne, ce qui n’existe pas dans le texte de Franck. J’ai écrit en italique ce refrain.

        Louange et Prière de 1938 a supprimé une strophe, la deuxième. Le Recueil de Cantiques luthérien de Paris-Montbéliard-Strasbourg de 1923 a encore les 4 strophes.

b. le texte de NCTC 266 et ARC 610

        Dans NCTC 266, on trouve un texte de Henri Capieu, censé remplacer celui de Cuvier. Mais ce texte est un peu confus, sans ligne directrice précise.

        On y trouve, au début et dans la 2e strophe, la plate titulature  » Jésus, mon frère « , qui est étrangère à l’original allemand, lequel parle de  » Bräutigam – l’époux . »  Cette image mystique, qui exprime l’union de l’âme avec le Christ, ne peut pas être traduite par le  » frère « , la fraternité n’étant pas l’union, mystiquement conjugale, du Christ masculin avec l’âme féminine. D’ailleurs l’incipit et le tercet d’entrée n’en parlent pas : le mot  » Bräutigam  » n’apparaît qu’au 5e vers. Les trois premiers vers disent :  » Jesu, meine Freude,  Meine Herzens Weide, Jesu, meine Zier : Jésus, ma joie, Jésus, la pâture de mon coeur, Jésus, ma parure. » Il n’y a aucun moyen de traduire directement ces concepts et ce vocabulaire. Il faut en rendre l’intention, en choisissant un registre analogue et proche, celui de l’amour et du bonheur. Ce que fait Cuvier, mais d’une manière un peu lourde, en disant  » Bienheureux qui t’aime, Jésus, bien suprême, Source du bonheur « . J’ai repris cette intention en remplaçant l’adresse détournée par une adresse directe :  » O Jésus que j’aime. « 

       Dans la 2e strophe, et à la fin de la 3e, apparaît le membre  » Que ma joie demeure « , qui est une interpolation de la traduction française courante de  »  Jesus bleibet meine Freude « , que J.S. Bach a magistralement harmonisé sur la mélodie de  » Werde munter, mein Gemüte.  » Ces deux chants ont une parenté évidente dans leur thèmes, mais cette citation répétée n’est pas heureuse. Il faut conserver l’indépendance des deux textes.

       Dans la troisième strophe, l’habituelle référence au  » silence « , qui est une des caractéristiques de Capieu, est étrangère à la thématique du chant. D’ailleurs, que signifie exactement :  » Seule ta présence  Met dans ton silence   Un désir profond  » ? Il est difficile de placer une présence dans un silence, et qui désire ici ? Le fidèle ? Ce n’est pas clair. Cette obscurité du texte nous fait remarquer que les textes mystiques sont toujours très clairs et compréhensibles, et ne se caractérisent pas par le flou de l’expression et l’imprécision du sens.

       Les rimes du texte ne sont pas toutes heureuses. Capieu intoduit trois rimes masculines identiques par strophe, ce qui n’est pas dans l’original. Celui-ci fait rimer le 3e et le 6e vers, le 7e vers restant libre, pour démarrer un nouveau tercet, placé à l’envers des deux précédents. Les rimes féminines sont simples, et indépendantes les unes des autres :

               A.     1.      fém   )                             Fr eude
                       2.      fém   )                             W eide
                       3.      masc   rime avec 6            Z  ier

               B.     4.      fém   )                             l ange
                       5.      fém   )                             b ange
                       6.      masc   rime avec 3            D ir

               C.     7       masc   vers libre                Bräutig am
                       8.      fém   )                             Erd  en
                       9.      fém   )                             werd en

        Cela complique le travail de Capieu, qui fait rimer  » vie  » avec  » nu-it « , ce qui est à la limite de la correction, mais surtout l’amène à répéter  » vie « , ce qui n’est pas autorisé en principe, car on ne doit pas faire rimer un mot avec lui-même. A la 2e strophe, il fait rimer  » épreuve  » avec  » demeure « , et  » devienne  » avec  » même « , ce qui est de l’assonnance. Le tout donne une faible euphonie au texte. Ajouté aux imprécisions du sens, cela fait un chant médiocre.
 
       A tout considérer, il me semble que le texte de Cuvier, révisé, remplit mieux sa fonction que celui de Capieu.

La mélodie :

        Elle est de Johann Crüger (Gross Breesen, Lusace1598-1662 Berlin), datée de 1653. En cette année, le compositeur a publié un nombre important de mélodies, sous le titre de  » Praxis pietatis melica. « 

        Cette mélodie exprime une marche avec le Christ, à travers un monde difficile. En même temps, les mouvements ascendants et descendants expriment les élans de l’âme. Certains passages sont plus passionnés, d’autres plus apaisés. La combinaison de cette progression et de cette fluctuation met le texte en valeur. Cela se sent bien dans le texte de Cuvier.