2008. 04 : dim LAETARE

Dimanche 2 mars 2008

Le Christ donné pour vous

Esaïe 54,7-10

( Série de Prédication VI (Predigtreihe VI) : liste complémentaire II )

Frères et sœurs en Jésus Christ,

« L’auteur des chapitres 40-55, nommé le second Esaïe, a prêché, au nom de l’Eternel, une bonne nouvelle au peuple exilé et captif à Babylone pour le consoler, l’encourager à supporter ses vexations et lui redonner l’espoir d’un retour à Jérusalem. Il a partagé dans le quotidien la situation dramatique du peuple juif qui s’est senti brisé, abandonné et esclave. Il a éprouvé en son sein l’humiliation causée par la défaite, la déportation et l’entrée en esclavage. Et cela d’autant plus, que le peuple vainqueur utilisa à merveille toutes les occasions pour manifester publiquement la supériorité de ses dirigeants, de son armée et de ses dieux. Défilés royaux, parades militaires et processions religieuses effectuées dans des cadres grandioses, à l’ombre des fameuses tours de Babel, démontraient aux plus réfractaires de quel côté se trouvaient le règne, la puissance et la gloire.
S’il nous est difficile aujourd’hui de prendre la mesure exacte du choc culturel qui avait ébranlé en ces temps anciens la vie des Israélites, nous pouvons néanmoins en avoir, par analogie, une idée en repensant à l’exode juif et aux camps de concentration durant le 3ème Reich et en lisant les témoignages de femmes et d’hommes non européens qui, sous la pression de la guerre, de la crise économique ou de la purification ethnique, ont été contraints de quitter leur pays pour tenter de vivre sous d’autres cieux, loin de leurs bases, loin de leurs traditions culturelles, loin de leurs réseaux d’amitié et de foi ».

Dans de tels contextes anciens ou nouveaux, l’évangile du Second Esaïe annonce pour n’importe quelle époque et pour n’importe quels communauté et individus déracinés ou exploités, désespérés ou désemparés, délaissés ou abandonnés, que Dieu promet un amour éternel et universel, la libération finale de tout joug, un accompagnement fidèle et durable, une bénédiction et une grâce sans faille et sans variation. Mais d’où provenaient le changement d’attitude et l’abandon de la colère punitive de la part de Dieu à partir du 6ème siècle avant Jésus Christ ? De deux motivations. Tout d’abord, Dieu veut consoler, parce que les siens ont payé « au double de leurs péchés » ; il reconnaît que tout malheur comporte un trop plein non mérité et arbitraire. Il est définitivement du côté de ceux qui souffrent, qui sont chargés et qui ploient sous les fardeaux. Ensuite, Dieu veut être amour et non plus père fouettard. C’est bien pourquoi, il a tant aimé le monde qu’il a donné son fils unique, afin que quiconque croit en lui, ne périsse point, mais qu’il ait la vie éternelle. C’est bien pourquoi, le Christ s’est donné pour, nous pour que même le mal que nous commettons et qui entraîne de justes rétributions, soit pardonné. Voilà la nouvelle alliance de paix de Jahvé dont parla l’évangile d’Esaïe. Voilà le Nouveau Testament du Christ dont parlèrent les quatre évangélistes.
L’évangéliste Esaïe a eu l’inspiration que la souffrance imméritée des uns se substituait aux contentements des pécheurs épargnés. Comme celle ou celui qui est comblé, doit se dévouer à celle ou celui qui est frappé injustement pour compenser ses déboires, ainsi celui que le destin « châtie » , comme on dit, fait également preuve de miséricorde, puisqu’il souffre en lieu et place de quelque autre. Ainsi le prophète a prédit la venue d’un envoyé spécial de Dieu qui se « chargerait de nos douleurs, sera brisé pour nos iniquités afin de nous guérir et de nous donner la paix ». La mission substitutive et compensatrice de ce « Serviteur de l’Eternel » est décrite dans Esaïe 53 qui est le texte de prédication de vendredi saint. Mais il fallait déjà en parler ici, puisque ce 4ème Dimanche de carême est consacré au Christ qui a accompli cette prophétie, en se donnant pour nous, en portant des fruits de miséricorde comme le grain de blé qui tombe en terre et en consolant les victimes. Grâce lui soit rendue.

Le prophète, parmi ses nombreuses argumentations pour étayer sa foi inébranlable en son Dieu créateur, sauveur et paternel, en utilisa deux dans notre texte. Tout d’abord, il annonça que même si des tsunamis, des cyclones, des accidents, des épidémies et autres catastrophes naturelles faisaient de nombreuses victimes innocentes, il n’y aurait plus de déluge total comme aux temps de Noé. Par là, il invita ses auditeurs à résister à l’envahisseur et aux envahissements de la nature, à garder la tête haute dans l’adversité et à prendre toutes les mesures pour la protection et la sécurité des humains. Ensuite, il annonça que même si la dérive des continents, les glissements de terrains et les tremblements de terre font vaciller et chanceler collines et montagnes, l’amour de proximité de Dieu était inébranlable et immuable.
Paul TILLICH fut invité à prêcher à Cap Kennedy au cours des préparatifs au lancement d’une navette spatiale. Il a choisi notre texte de prédication. Il a dit que ce que le prophète de jadis sentait intuitivement, à savoir que la terre bougeait, était aujourd’hui au pouvoir des scientifiques et des grandes puissances qui, comme à Nagasaki, pouvaient faire sauter la planète et indirectement faire vaciller les icebergs. Il a alors exhorté les décideurs à respecter la vie, à sauvegarder la création et à utiliser l’énergie atomique et le voyage de l’homme sur la lune à des fins pacifiques et utilitaires.

Dietrich BONHOEFFER qui ne voulait pas qu’on abuse d’une « billige Gnade » , donc que la grâce inconditionnelle de Dieu soit bradée, a dit : « Je crois que Dieu nous donne dans chaque situation de crise exactement les forces de résistance dont nous avons besoin. Mais il ne les donne pas à l’avance, afin que nous ne comptions pas que sur nous-mêmes, mais uniquement sur lui. Dans une telle foi, toutes les peurs devant l’avenir devraient être surmontées ». Amen.

Georges BRONNENKANT


Propositions de cantiques du recueil « Arc en ciel » :

Psaume : 84 ; chants bibliques : 167,179,460 ; chorals de passion : 409,411,610.

¼ – Service des Lecteurs – SL – 9 – 02.03.2008 – Georges BRONNENKANT