2007. 05 : dim CANTATE, 4e après Pâques

Esaie 12, 1-6 – Dim. 6 Mai 2007 – 4e Dim. a. Pâques
EPAL – Service Lecteurs – Jehan Claude Hutchen – Strasbourg

               
                   Dimanche 6 mai 2007 

                            Cantate 

                     Le chant nouveau

               4e Dimanche après Pâques 

                       Esaïe 12/1-6


Série VI (Reihe VI)  : liste complémentaire II :

Ce cantique d’Esaïe ne fait pas partie du psautier mais il pourrait en être : il est clair qu’il s’agit d’un chant liturgique ; cela prouve seulement que tous les chants liturgiques n’ont pas été inclus dans le psautier. Psaume de confiance, psaume d’action de grâce parce que Dieu nous sauve, on pourrait croire que tout était rose…!

Hélas, le contexte politique est tout à fait sombre. Nous sommes au huitième siècle av. J.C., vers 740 730. L’empire assyrien (capitale Ninive) est la puissance montante, son expansion semble irrésistible. Beaucoup de textes de cette époque reflètent la crainte qui pèse sur toute la région… Il est l’Ennemi, le Danger public

À cette époque là, le peuple de Dieu est divisé en deux royaumes (depuis la mort de Salomon vers 930) deux royaumes minuscules, tout proches l’un de l’autre ; donc ce qui menace l’un menace inévitablement l’autre. Ces deux royaumes   qui devraient au moins être frères, à défaut d’être unifiés   mènent des politiques différentes, et parfois même opposées : c’est le cas ici. Le royaume du Nord (capitale Samarie) tente de résister à la pression assyrienne. Et pour résister, il fait alliance avec le roi de Damas et entreprend le siège de Jérusalem pour contraindre son roi, Achaz, à entrer dans leur coalition.

Achaz, finalement, préfère capituler avant de combattre pour une cause qui lui semble perdue d’avance : il demande de lui-même à être reconnu comme vassal de l’Assyrie. Il achète sa sécurité, mais il y perd sa liberté, évidemment. À vues humaines, son calcul est sage, il a raison ! Oui, mais… le peuple élu de Dieu a t-il le droit de raisonner « à vues humaines »? Ses calculs sont guidés par ses craintes, mais un croyant a t il le droit de craindre ? Où donc est passée sa foi ?

L’attitude d’Esaïe est très ferme : « reste calme, ne crains pas » (4)… « si vous ne croyez pas, vous ne subsisterez pas » (7,9). On croit l’entendre dire : « homme de peu de foi ». Et là commence tout un passage de paroles d’espérance, qui occupent les chapitres 7 à 11.

« Voici le Dieu qui me sauve, j’ai confiance, je n’ai plus de crainte. »
Il y a là plus que la joie de la libération, il y a une véritable profession de foi. Le livre de l’Exode dit dans les versets précédents : « Le peuple mit sa foi dans le Seigneur et en Moïse son serviteur. Alors, avec les fils d’Israël, Moïse chanta ce cantique au Seigneur… »

Esaïe, cinq cents ans plus tard, reprend la même profession de foi pour soutenir ses contemporains ; et eux, qui savent lire entre les lignes, comprennent le message du prophète : comme Dieu a su vous libérer du Pharaon   et pourtant, à vues humaines, c’était impensable   de la même manière, bientôt, Dieu vous libérera de l’empire assyrien ; car celui ci, même s’il vous fait très peur, ne pèse pas plus lourd que l’Égypte en face de Dieu.

Moïse avait déjà expérimenté l’extraordinaire présence et proximité du Dieu tout puissant du Sinaï. Esaïe revit cette même expérience, mais il la traduit avec ses mots à lui. Depuis sa vocation, il est très marqué par la Grandeur de Dieu, sa Sainteté: rappelez vous le récit de sa vocation. Ébloui autant qu’effrayé par la vision grandiose, il ne savait que répéter : « Saint, Saint, Saint, le Seigneur, le tout puissant. » Ici, il redit cet éblouissement devant la grandeur de Dieu, mais il emploie une expression qui devrait à première vue nous sembler paradoxale : « Il est grand au milieu de toi, le Saint d’Israël. » Dieu est le Saint, ce qui veut dire le Tout Autre, l’inaccessible, mais, en même temps, il se fait tellement proche que son peuple peut oser prétendre à une relation de proximité avec lui : Il est le Saint « d’Israël », ce qui veut dire que le peuple élu peut se prévaloir d’une véritable appartenance et son Dieu est au milieu de lui.

N’en déduisons pas qu’Israël veuille se réserver l’exclusivité de la relation d’Alliance avec Dieu : chaque fois qu’un psaume s’émerveille sur l’élection d’Israël, il y a également une note d’universalisme parce que, depuis toujours, l’élection est comprise non comme une exclusive, mais comme une vocation. Ici la note d’universalisme est dans la formule: « Annoncez parmi les peuples ses hauts faits !  »

Pour répondre à sa vocation et nous pouvons reprendre ceci à notre compte désormais le peuple sauvé n’a qu’une chose à faire : se contenter de témoigner au milieu des hommes, par ses chants et par sa vie que Dieu réellement est son libérateur : Ainsi Pâques revient chaque année pour relancer notre croissance et permettre que se noue en chacun de nous ce dialogue essentiel avec la Parole. Car en chacun de nous, au delà du bruit ou du vide ou de l’angoisse qui l’habitent, il y a une parole silencieuse qui demande à être articulée, une parole informe qui demande à être formulée, une parole première qui attend que lui soit ouvert l’espace de nos solitudes et que se réconcilie avec elle ce qui en nous est nais¬sance et promesse.

Dans notre société où les corps bavardent, gesticulent et s’exhibent selon le code des apparences et s’étourdissent dans les images publicitaires, les chrétiens se reconnaissent peut être à ceci leurs regards, leurs gestes et leurs paroles naissent du dedans, des profondeurs d’une parole primordiale qui donne forme à leur comportement. Ils ne prêchent pas l’invisible, mais par eux l’invisible devient visible. Ils ne discourent pas sur la paix, le partage et la tendresse, mais la Parole qui les habite se fait main tendue, main ouverte caresse  et chant. voilà pourquoi nous chantons.  

Sans nous en apercevoir nous vivons dans une société de surveillance mutuelle où chacun regarde l’autre avec l’oeil du moraliste et du psychiatre, du justicier et du policier, du cameraman et du publiciste. Le soupçon nous fait complices les uns des autres, comme le sont le maître et les élèves. Les élèves qui redoutent l’oeil du maître, le maître qui se sait soumis aux yeux de ses élèves. Chacun est habité par la hantise de perdre la face devant les autres. L’enfer, c’est les autres et l’on voit mal comment Dieu lui même ne finirait pas par devenir, tel qu’on l’a souvent représenté, cet oeil menaçant qui nous tient littéralement en joug et nous condamne à vivre en esclaves.

Il ne nous sert à rien de dire que Dieu est amour et bonté, de le chanter si nous ne reconnaissons pas la bonté foncière de ses créatures, à commencer par nous mêmes. Imaginons que nous nous mettions à nous réjouir de ce que sont les autres, de ce que font les autres, de leur foi quand la nôtre vient à manquer, de la beauté de leur vie quand ils ne partagent pas nos convictions, de leur bonheur quand le malheur s’abat sur nous, de leur réussite familiale ou professionnelle quand nous essuyons un échec ! Imaginons que nous les regardions sans jalousie, sans suspicion et sans convoitise

Comme notre vision du monde, comme notre prière, comme la vie de nos communautés seraient changées si nous trouvions chez eux des motifs de louange et des raisons d’espérer ! Une des rares prières de Jésus que nous connaissions n’est elle pas de cet ordre: «Père, je te rends grâce d’avoir révélé ton mystère aux petits et aux humbles» ?

En ce jour important pour notre pays, laissons les vieilles rengaines et les plaintes sans fin, chantons ! Et n’ayons pas peur de chanter notre reconnaissance et notre foi.

PREDICATIONS DU SERVICE DES LECTEURS DE L’UEPAL

Ces prédications sont fournies par le Service des Lecteurs de l’UEPAL.

Ce service a été dirigé par le pasteur Georges HUFFSCHMITT de Wingen-sur-Moder
puis 67290 VOLKSBERG (tél O3.88.01.55.41, courriel: g.hufschmitt@wanadoo.fr),
jusqu’en 2009.

A partir de cette année 2010, Mme Esther LENZ, de 67360 MORSBRONN-LES-BAINS
(tél: 03.88.90.07.02, courriel: esther.lenz@wanadoo.fr) reprend la direction.

Le Secrétariat est assuré par Madame Suzanne LOEFFLER, au Secrétariat
de la Paroisse de 67340 INGWILLER
(tél: 03.88.89.41.54, courriel : Suzanne.Loeffler@orange.fr).