Septuagésime (env. 70 jours avant Pâques)
Mérite et grâce
Dimanche 23 janvier 2005
Luc 17, 7-10
( Série de Prédication III (Predigtreihe III) : nouveaux évangiles )
Jésus demande aux disciples de se mettre dans la peau d’un esclave qui appartient à son maître, et ce, corps et âme, au même titre que les animaux domestiques. Il peine toute la journée à labourer les champs et faire paître les troupeaux qui ne sont pas les siens !…. En outre, une fois rentré des champs, le serviteur n’a pas terminé son travail. Ce qu’il a fait à la fin d’une journée ordinaire, c’est-à-dire travailler avec acharnement dans les champs et s’occuper des animaux de son maître, n’a rien d’extraordinaire aux yeux de ce dernier. C’est normal de la part d’un esclave, et c’est ainsi, qu’à peine rentré, une nouvelle tâche lui est assignée, à savoir, préparer à manger et servir le maître à table. Après quoi, l’esclave pourra peut-être lui-même se restaurer des restes que le maître aura eu la bonté de lui laisser. Eh oui !!! Voilà ce qui caractérisait la condition d’esclave : n’avoir aucun droit et uniquement des devoirs, et aucun esclave n’aurait songé à s’en plaindre. Le maître n’a donc pas à dire « merci » à son serviteur : il était communément normal et admis, que l’esclave se coupe en quatre pour satisfaire aux besoins, voire aux caprices de son maître, sans que celui-ci ait même seulement songé à le rétribuer de quelque façon que ce soit. Voilà ce qui se passait du temps de Jésus, il y a 2000 ans.
Nous, nous vivons au 21ième siècle : voilà que l’humanité au fil du temps à réussi à planter un décor social et politique radicalement neuf mais qui n’est pas appliqué partout : il s’agit du fameux modèle libéral prôné par les pays de l’Ouest.
L’humanité s’est en effet, grâce à la diffusion de l’Evangile, éveillée à un idéal d’amour fraternel et de justice, qui sommeillait en elle. C’est ainsi que nous bénéficions d’une civilisation qui plonge ses racines jusqu’au milieu du 5eme siècle, avec l’avènement du premier Empereur chrétiens, Constantin .
Le texte des Evangiles se référe à un stade de la civilisation bien antérieur, et qui est celui de la fin du 1er siècle ! Nous devons donc tenter de penser le texte de Luc 17 pour aujourd’hui : c’est ainsi que les autorités compétentes nous assurent et réassurent à souhait que, « officiellement » , dans notre pays, toute espèce d’esclavage est punie par la loi.
Certes, au moins chez nous, une page est sans doute définitivement tournée : il n’y a plus de reconnaissance officielle d’une répartition de la population entre, d’un côté ceux qui travaillent sans avoir de droits, et de l’autre ceux pour qui l’on travaille et qui ont tous les droits. Ce changement radical de pensée a entraîné avec le temps une transformation profonde dans les mentalités : l’homme, affranchi des entraves de l’esclavagisme , travaille pour la société mais aussi pour lui-même, c’est-à-dire qu’il touche un salaire mais paye aussi des impôts . Cela revient à dire qu’il a des droits et aussi des devoirs. Dans les cas où cela se passe normalement, l’homme affranchi est jugé, classé d’après une série de critères, dont doivent être exclues l’origine sociale, économique et raciale de l’intéressé. Sont, en revanche à prendre en compte le caractère de l’individu, son sens de la responsabilité, sa moralité, son passé judiciaire, ses capacités intellectuelles et autres. L’homme nouveau , aux antipodes de l’esclave, est celui qui sait ce qu’il veut et a le droit de se donner les moyens de son ambition ; il lui faudra aussi apprendre à être humble pour parvenir à ses fins : prenons l’exemple de ce jeune , qui, embauché le samedi soir dans un restaurant, sert aux clients des tartes flambées à tour de bras, afin de financer ses études ; S’il se coupe en quatre et cherche à assurer son service du mieux qu’il peut, il agit volontairement ; il sait pourquoi il le fait ! A la clé, il y a un salaire, une paye, additionnée de pourboires, et obtenue ce soir-là à la sueur de son front.
La jouissance d’un espace de liberté accordée en principe à tout un chacun, ne va pas sans générer des problèmes : C’est ainsi qu’un nombre croissant d’individus font un mauvais usage de la part de liberté qui leur échoit : se croyant tout permis ils oublient que le champ de leur liberté s’arrête là où commence la liberté d’autrui. Prenons en exemple l’observance du code de la route ! Chez nous, en France, on a l’impression que l’usage du clignotant est laissé au libre choix de chacun ! Ou bien : Qui prend encore soin de s’arrêter devant un passage clouté, afin de laisser passer les piétons déjà engagés Bref ! Comme le dit le mot d’ordre : montre-moi comment tu roules et je te dirai qui tu es.
Pour ma part, afin d’encourager le petit nombre de ceux qui respectent le code, à persévérer dans cette voie, j’ai décidé de gratifier d’un geste de reconnaissance, par exemple celui qui me laisse traverser au passage à piétons. Débattant avec un ami de cette problématique, ce dernier me fit, un jour, remarquer que je n’avais pas à remercier quiconque n’agit, somme toute, qu’en accord avec les règles élémentaires de conduite. A quoi je répondis que si chacun, sans pour autant vouloir devenir un champion en matière de foi et de bonnes œuvres, se contentait journellement, de poser de petits signes de respect et d’amour (franche poignée de main et autre, je vous assure que cela seul suffirait déjà à saper à la longue, les fondements du mal ! En ce sens, chacun de nous porte une part de responsabilité quant au devenir de ce bas monde ! Car enfin que constatons-nous ? Pour nous en tenir uniquement au plan mondial, citons ces scandales, que constitue l’existence d’un tiers-monde et d’un quart-monde, et des fléaux tels que les prises d’otages et les délocalisations, etc…Eh oui ! Il reste bien du pain sur la planche pour quiconque adhère au message du Christ.
Quelle leçon pouvons-nous tirer de ce texte de Luc 17 pour nous aujourd’hui ? Je crois que le contenu de ce texte très court, veut nous dire en somme la chose suivante : A l’image de l’esclave qui n’a d’autre issue que d’apprendre à travailler sans relâche et sans attendre aucune gratification, ainsi nous aussi, sommes soumis à un maître, mais un maître qui veut instaurer sur terre une loi d’amour qui vise l’égalité et la fraternité. Pour qui se sent une vocation de combattant pour la liberté et la justice le maître mot est l’obéissance dans un esprit d’humilité, l’abnégation de soi. C’est donc bien ce que suscite l’image de l’esclave et du maître, à savoir, un appel à apprendre à travailler sans relâche pour satisfaire aux exigences d’un maître qui n’aura de cesse que son règne de justice ne soit établi sur toute la terre.
Christian MATTER, pasteur
PREDICATIONS DU SERVICE DES LECTEURS DE L’UEPAL
Ces prédications sont fournies par le Service des Lecteurs de l’UEPAL.
Ce service a été dirigé par le pasteur Georges HUFFSCHMITT de Wingen-sur-Moder
puis 67290 VOLKSBERG (tél O3.88.01.55.41, courriel: g.hufschmitt@wanadoo.fr),
jusqu’en 2009.
A partir de cette année 2010, Mme Esther LENZ, de 67360 MORSBRONN-LES-BAINS
(tél: 03.88.90.07.02, courriel: esther.lenz@wanadoo.fr) reprend la direction.
Le Secrétariat est assuré par Madame Suzanne LOEFFLER, au Secrétariat
de la Paroisse de 67340 INGWILLER
(tél: 03.88.89.41.54, courriel : Suzanne.Loeffler@orange.fr).