2005. 12 : 12e Dim après la TRINITE

La grande guérison

 Dimanche 14 août 2005

 Esaïe 29, (9-16) 17-24


( Série de Prédication III (Predigtreihe III) : nouveaux évangiles )

Note du rédacteur : je propose de faire débuter le texte de prédication au verset 9, parce que l’annonce contenue dans les versets 17-24 est la réponse apportée par le prophète aux questions soulevées en 9-16 ; une réponse inattendue de la part de Dieu :  là où logiquement on pouvait s’attendre à l’annonce d’un châtiment violent des chefs politiques et religieux de Jérusalem qui menaient leur peuple à sa perte,  vient une annonce d’espérance évoquant la conversion de leur conscience et la guérison de leur surdité e det leur cécité spirituelles.

I

« Pour qui prenez-vous Dieu ? » – Cette question est en filigrane derrière les paroles cinglantes que le prophète Esaïe adresse aux chefs politiques et religieux de Jérusalem. « Pour qui prenez-vous Dieu et pour qui vous vous prenez vous-mêmes pour vous conduire comme vous le faites ? » 

(V.15-16) : « Malheur à ces gens qui agissent en secret, cachent leurs plans à Dieu et trafiquent dans l’ombre en se disant : « Qui peut nous voir et savoir ce que nous faisons ? » – «  Quelle absurdité que la vôtre, leur réplique Esaïe,  vous mettez sur un plan d’égalité l’argile et le potier qui la travaille ! L’objet  dira-t-il de l’artisan qui l’a fabriqué : « Ce n’est pas lui qui m’a fait ? » Et le vase dira-t-il du potier qui l’a façonné : « Il n’y connaît rien ? » – Autrement dit : « Pour qui prenez-vous Dieu ? Pour un artisan impuissant renié par son ouvrage, pour un potier dont se moquerait le vase qu’il a fait de ses mains ? Pour pas plus, ou peut-être même pour moins qu’un homme ? Ou même pour rien du tout ?  « Pour qui prenez-vous Dieu, en agissant comme vous le faites, en abusant de votre pouvoir et de vos richesses, tout en faisant semblant de servir Dieu et d’agir pour le bien du peuple ? »

Après ces paroles d’indignation, après tous les discours enflammés et tonitruants jetés à la figure des chefs politiques et religieux de Jérusalem, après les grands cris de l’amour blessé de Dieu clamés par Esaïe, que va-t-il se passer ? Une intervention miraculeuse du Dieu « Sauveur » tendant sa main pour retenir ses enfants rebelles au bord du gouffre et empêcher qu’ils n’y soient engloutis ? Ou bien une intervention puissante du Dieu « Souverain des armées célestes » lançant la foudre du ciel pour anéantir ceux qui osent le défier ? Ou encore une manifestation prodigieuse du Dieu « Tout-puissant » prouvant une fois pour toute sa supériorité divine ? Dieu va-t-il au moyen de son prophète Esaïe, « leur faire voir ce qu’on va voir » ?   Dieu va-t-il réagir comme le ferait un homme vexé, humilié, ridiculisé, saisi par la colère et la violence de son orgueil blessé ? Ou le prophète va-t-il succomber à la tentation de vouloir venger lui-même l’honneur bafoué de son Dieu ? C’est ainsi que cela se passe généralement entre les humains… Alors, Dieu à l’image de qui, selon la Bible, ont été créés les humains, Dieu va-t-il réagir « à l’image des hommes » avec force et violence, avec pertes et fracas ? Dieu va-t-il confondre par la force le désir de puissance des hommes ? Le croyant, indigné et blessé dans son zèle pour Dieu, attend que se manifeste puissamment la justice divine. Dieu doit avoir le dernier mot, sinon serait-il encore Dieu ?

II

Et voici le dernier mot de Dieu en cette affaire (V.17-18): « Encore un peu de temps, et la forêt du Liban deviendra un verger, et le verger une forêt. Ce jour-là les sourds entendront ce qui est dit dans le livre et, délivrés de l’obscurité et des ténèbres, les aveugles se mettront à voir. »   Retournement total de situation ! « Encore un peu de temps, et… » : cette petite mention rappelle que le temps est à Dieu, et que c’est lui qui garde l’initiative. C’est lui qui est et reste le potier façonnant l’argile de la pâte humaine et de l’histoire du monde. « Encore un peu de temps, et… » et quoi ? Là où était attendue la justice divine dans toute sa rigueur, advient la bonté fidèle et patiente de Dieu. Les sourds qui entendront, ce  sont  ceux que Dieu avait laissés s’enfoncer dans leur endurcissement puisqu’ils s’obstinaient à ne pas vouloir entendre les paroles de vie et les appels à la raison transmis par Esaïe. Les aveugles qui seront délivrés de l’obscurité et des ténèbres, ce sont tous ceux que Dieu avait laissés s’égarer dans leurs illusions et leurs fausses certitudes, puisqu’ils persistaient tous à ne pas vouloir voir le chemin de Dieu indiqué par Esaïe (V.9-12).  Oui, encore un peu de temps, et les esprits obtus, les oreilles bouchées et les yeux  verrouillés s’ouvriront d’eux-mêmes, lorsque la parole patiente et fidèle de Dieu sera parvenue à percer les murailles de l’endurcissement. Voilà le dernier mot de Dieu : il appelle avec compassion, fidélité, patience et persuasion, sans désespérer. Il appelle sans cesse, encore et encore, encore et toujours.  Envers et contre tout, Dieu se révèle porteur d’un avenir ouvert. Un avenir ouvert, là où à vue d’homme tout semble clos, perdu, sans espoir et sans avenir.

Alors, lorsque ce « encore un peu de temps » sera accompli, lorsque les sourds entendront et les aveugles verront, lorsque ceux qui s’étaient endurcis écouteront Dieu et regarderont à lui, alors, pour tout le peuple ce sera jour de joie, ce sera temps du bonheur (V.19-24). Les choses seront à nouveau à leur place parce que Dieu sera à nouveau reconnu à la place qui est la sienne. La vie retrouvera son cours normal parce que Dieu sera à nouveau pris pour « qui il est et ce qu’il est ».

III

« Pour qui prenez-vous Dieu en agissant comme vous le faites ? » En interpellant les chefs de Jérusalem sur ce point, Esaïe voit juste et met le doigt sur les vrais enjeux. Selon qu’ils prennent au sérieux Dieu et sa parole, ou au contraire qu’ils n’en tiennent pas du tout compte – et c’est là ce qu’ils font – les chefs de Jérusalem révèlent de la sorte l’importance qu’ils accordent ou non à la conscience humaine. Car au-delà du respect ou non de Dieu, ce qui est en jeu ici, hier comme aujourd’hui, c’est le oui ou le non à la conscience humaine et au respect de l’être humain. Aux yeux d’Esaïe, mépriser Dieu, c’est du coup mépriser aussi le prochain et tout ce qui rend la vie juste et bonne aux humains. C’est mépriser aussi toute réflexion sur le bien ou le mal, la justice et l’injustice, la dignité et l’honnêteté. Celui qui agit ainsi nie aussi toute qualification morale de ses actes et scandalise les petits et les faibles. Agissant de la sorte, il entraîne à sa suite tout ce qu’il touche vers le malheur et la destruction. Avec Esaïe, le croyant choqué dans sa foi et indigné pour son Dieu, aimerait voir tous ces méchants renversés, balayés, exterminés par une puissante intervention divine.

Mais le dernier mot de Dieu n’est pas la destruction de ses adversaires. Son dernier mot, c’est de les interpeller afin qu’ils ouvrent les yeux et les oreilles et entendent dans leur cœur et leur conscience sa parole de pardon et de vie. Dieu ne désire pas leur renversement, mais leur retournement, leur changement de cap. Car, à l’inverse de l’homme sans conscience qui mène tout à la perte, l’homme de conscience lui, se situe devant Dieu et se reconnaît pécheur devant lui. Quand il agit mal en pensée, en parole, par action ou par omission, l’homme de conscience se repent, tente de réparer l’injustice commise, demande pardon, réfléchit, grandit spirituellement et moralement. Et dans cette démarche d’humilité et de confiance, il connaît vraiment Dieu.

Hier comme aujourd’hui, c’est là le retournement que désire susciter Dieu, afin que « les esprits égarés découvrent l’intelligence de la vie, et que les récalcitrants acceptent de se laisser instruire » (V.24). C’est à ce retournement qu’a vécu Saul le pharisien sur la route de Damas. C’est à ce retournement que Jésus appelle tout homme. Amen.

                                                Marc WEISS, pasteur au CHU de Strasbourg-Hautepierre

Les autres textes du jour :

Psaume 147 : une louange à Dieu qui suscite l’espérance ;

Psaume 30 : une louange à Dieu qui renouvelle la vie ;

Actes 9, 1-9 (10-20) : sur le chemin de Damas, du renversement au retournement  de Saul le pharisien.

Marc 7, 31-37 : la guérison d’un sourd préfigure la guérison de la surdité spirituelle par la force de l’Evangile.

Propositions de chants :

ARC 228 = NCTC 244 : « Qu’aujourd’hui toute la terre… »

ARC 252 = NCTC 258 : « Nous te célébrons… »

ARC 229 : « Touches nos oreilles… »

ARC 231 : « Dans ta parole, ô Dieu…

NCTC 257 : « Dieu des louanges soit béni… »    

PREDICATIONS DU SERVICE DES LECTEURS DE L’UEPAL

Ces prédications sont fournies par le Service des Lecteurs de l’UEPAL.

Ce service a été dirigé par le pasteur Georges HUFFSCHMITT de Wingen-sur-Moder
puis 67290 VOLKSBERG (tél O3.88.01.55.41, courriel: g.hufschmitt@wanadoo.fr),
jusqu’en 2009.

A partir de cette année 2010, Mme Esther LENZ, de 67360 MORSBRONN-LES-BAINS
(tél: 03.88.90.07.02, courriel: esther.lenz@wanadoo.fr) reprend la direction.

Le Secrétariat est assuré par Madame Suzanne LOEFFLER,
au Secrétariat de la Paroisse de 67340 INGWILLER
(tél: 03.88.89.41.54, courriel : Suzanne.Loeffler@orange.fr).