2006. 12 : 12e Dim après la TRINITE

La grande guérison

 Dimanche 3 septembre 2006

 Actes 3/1-10 (11-20+25-26)


( Série de Prédication IV (Predigtreihe IV) : nouvelles  épîtres )

Note du rédacteur. La liste officielle des textes prévoit uniquement les versets 1 à 10, c.a.d. le récit de la guérison miraculeuse. La suite du chapitre relate un long discours où Pierre explique, non pas l’origine de la force miraculeuse qui a guéri cet homme, mais le plan de salut de Dieu que cette guérison vient  illustrer. Prêcher sur 1-10 risque de focaliser l’attention de l’auditoire uniquement sur l’aspect extraordinaire de la guérison. Prendre en compte également le discours de Pierre resitue le miracle dans sa fonction de « signe du Royaume de Dieu » et étend ainsi l’attention à la dimension spirituelle de la guérison. C’est le choix du rédacteur qui a également pris l’option de la forme narrative pour éviter de donner à cette prédication une forme trop dogmatique. Cette narration est construite à partir de la personne de Pierre, d’où la nécessité de rester dans la cohérence des récits sur Pierre tels que Luc les relate dans le cadre de son écrit en 2 tomes « Evangile » et « Actes des apôtres ».

A Jérusalem, en l’an 33, quelques jours après la fête de Pentecôte. Pierre et Jean, des disciples de Jésus, montent au temple pour participer à la prière de l’après-midi. Comme tous les jours, un mendiant est assis à l’entrée appelée « La belle porte ». Pierre et Jean ont déjà entendu parler de lui, car ici tout le monde connaît son histoire. Il est infirme de naissance et incapable de se tenir sur ses pieds. Alors, chaque jour des voisins l’apportent et le déposent là, pour qu’il puisse demander l’aumône à tous les gens qui viennent au temple. Jour après jour, depuis de longues années, il est là, du matin au soir, à tendre la main avec l’espoir de recueillir de quoi manger. Voyant approcher Pierre et Jean il tend la main vers eux pour quémander une piécette.

En venant au temple, Pierre avait déjà vu cet homme mendier. Mais ce jour-là, cette main tendue vers lui dans l’attente d’une éventuelle aumône, le bouleverse, car derrière cette main tendue, il voit un homme. Pierre se sent profondément ému. Pour la foule qui vient au temple, cet homme n’est qu’une main tendue pour mendier. Parmi tous ceux qui lui donnent une pièce, combien y en a-t-il qui ont conscience qu’il leur rend aussi un service ? En effet, quand ils viennent aux offices et aux prières, ce mendiant leur donne l’occasion de pratiquer l’aumône, un des piliers de la foi. En lui faisant la charité, ils se mettent en règle avec Dieu ! Cela mériterait bien un peu de sympathie, un regard chaleureux et quelques paroles amicales. Mais lui, il reste là, à la porte du temple, avec interdiction absolue de s’y faire porter, parce que son infirmité fait de lui un impur, un exclu du lieu saint, un exclu de la communauté de prière, un exclu du peuple saint ! Il est pourtant fils du peuple juif autant qu’eux tous, fils d’Abraham au même titre qu’eux ! Mais pour eux tous, il n’est qu’une main tendue qui mendie de quoi survivre et un alibi pour être en règle avec la religion.

Pierre est bouleversé. En voyant cet homme assis là avec sa main tendue, il se souvient. Il se revoit dans sa barque de pêche sur le lac de Tibériade, du temps où il n’était encore que Simon le pêcheur. Quand il rentrait au port après sa nuit de pêche, ce n’est pas vers lui que se tournaient les regards des gens qui attendaient sur le rivage. Ce n’est pas lui qui les intéressait, c’étaient ses paniers. Ce sont ses paniers que l’on fixait des yeux pour voir s’il y avait du poisson dedans. Et quand la pêche avait été bonne, c’était à qui aurait le poisson le plus beau et au meilleur prix ! Alors on lui causait au Simon, on marchandait, on négociait, les yeux toujours rivés aux paniers de poissons. Mais, quand les paniers étaient vides ou ne contenaient que du menu fretin, les regards se détournaient, on allait voir chez les autres pêcheurs, on ne causait pas avec le Simon. Hé oui, pour les autres il était avant tout le pourvoyeur de poisson, la main qui dirigeait le bateau, lançait le filet et déchargeait les prises de la nuit. On ne se souciait que du résultat de son travail, pas de ses états d’âme : sauf pour quelques amis et la famille,  il n’était que Simon le pêcheur, l’homme au poisson.

Mais un beau jour tout avait changé !  – (Luc 5) – Il était là, dans sa barque, fatigué et déprimé, après une nouvelle nuit de pêche pour rien. Il était là avec ses équipiers, à laver et ravauder les filets, à l’écart sur la plage. Pas très loin de là, sur le rivage une grande foule s’assemblait, il y avait de l’animation. Tout à coup un grand silence. Et puis une voix puissante a retenti et fait vibrer son cœur. C’était ce Rabbi Jésus, ce prêcheur dont on parlait tant dans toute la région. Depuis quelque temps il allait et venait en parlant du Royaume de Dieu. Il disait qu’aux yeux de Dieu chaque personne était unique et précieuse !… Qu’il était toujours possible de changer de cap et construire une nouvelle vie !… Que le pardon de Dieu était plus fort que tout !… Et pour bien le montrer il guérissait même les malades et chassait les démons ! Et ce jour-là ses paroles vigoureuses firent monter dans le cœur de Simon le pêcheur des vagues d’émotion aussi puissantes que les flots rugissants des tempêtes en mer ! C’était comme si  Jésus parlait uniquement pour lui, Simon !

Puis il y eut ce regard, ce regard qui le saisit et l’enveloppa ! Jésus s’était approché et lui demanda de pouvoir monter dans la barque et s’éloigner un peu du rivage, tant la foule le pressait. Laissant là ses filets, Simon accepta. Il ne perdit rien de tout ce que Jésus prêcha ce jour-là !  Chaque mot le toucha et résonna en lui. Il vibrait de tout son cœur et de toute son âme. Le prêche une fois terminé, Simon s’apprêta à revenir au rivage, mais à nouveau le regard de Jésus se posa sur lui, un regard si intense que Simon arrêta les rames dans l’attente d’une parole directement à lui. Il sentit que Jésus lisait au fond de son cœur son découragement de la nuit passée en mer à ne rien pêcher… mais aussi la soif de vie qui venait de renaître au plus profond de lui. Et puis cette parole inattendue, énorme, insensée même en plein après-midi : « Avance ta barque en eau profonde, puis toi et tes compagnons, jetez vos filets pour pêcher. » – C’était en dépit du bon sens, mais cette parole était si assurée, et ce regard si saisissant… que Simon en fut tout retourné : « Maître, nous avons travaillé toute la nuit sans rien prendre, mais parce que toi tu me dis de le faire, je vais jeter mes filets ! »… et ce fut une pêche miraculeuse !

Là où la foule ne vit qu’une extraordinaire quantité de poissons, Simon et ses compagnons virent l’action de la main de Dieu. Simon sentit qu’il était là aux frontières du Royaume de Dieu et il fut saisi d’une grande crainte comme Moïse devant le buisson ardent. Et puis cette nouvelle parole qui le saisit : « N’aie pas peur, désormais tu seras pêcheur d’hommes ! »  Ce jour-là, sa vie bascula. Avec ses compagnons, il partit à la suite de Jésus et il devint Pierre le disciple. Il y eut ces longs mois d’itinérance  à travers la Galilée, la Judée et la Samarie. Il y eut la tragédie de Golgotha, le miracle de Pâques et puis les événements de Pentecôte.

Et aujourd’hui, Pierre est bouleversé. Ce mendiant couché à la porte du temple, au seuil du lieu où Dieu est proche, il est comme lui il y a quelques mois dans sa barque ! Cet homme est unique et précieux aux yeux de Dieu autant que lui. L’amour et le pardon de Dieu sont autant pour lui que pour tous les autres…Si Jésus était maintenant là, il le guérirait à coup sûr… Alors, Pierre pose son regard sur le mendiant, un regard tout rempli de l’esprit de Jésus. Et puis cette parole : « Regarde nous bien !… Je n’ai ni or ni argent… mais ce que j’ai, je te le donne : au nom de Jésus-Christ de Nazareth, lève-toi et marche ! »  Une parole inattendue, énorme, insensée pour les hommes… Car si cet homme est infirme depuis sa naissance, seul Dieu pourrait le guérir s’il le voulait !  Et c’est le miracle, le signe de l’action de Dieu à travers le nom de Jésus et la foi de Pierre : l’homme sent la force revenir en lui et son corps renaître, il se  lève et bondit comme un cabri pour entonner un Alléluia retentissant et louer Dieu ! Et laissant là sa natte, il suit Pierre et Jean dans le temple où jusqu’ici il lui était interdit d’entrer. Et là, comme tous les croyants, il loue et bénit le nom de Dieu pour tous ses bienfaits.

Stupéfaction de la foule : quel est ce prodige ? Qui en est l’auteur ?

Là où la foule ne voit que motif à s’étonner, à s’inquiéter ou s’extasier, Pierre leur fait voir la main tendue, le regard compatissant et la promesse d’amour de Dieu en Jésus-Christ : « La promesse que Dieu a faite par les prophètes est pour vous et vous avez part à l’alliance que Dieu a conclue avec vos ancêtres quand il a dit à Abraham : « Je bénirai toutes les familles de la terre à travers tes descendants. » Ainsi Dieu a fait apparaître son serviteur Jésus pour vous d’abord, il l’a envoyé pour vous bénir en détournant chacun de vous du chemin de l’égarement. » (Luc 4, 25-26).

Et aujourd’hui, cette promesse est pour chacune et chacun d’entre nous. Et aujourd’hui encore, le miracle, la guérison c’est renaître en se laissant saisir par la force de l’Evangile.                  Amen.     

Marc WEISS

Pasteur au CHU de Strasbourg-Hautepierre

PREDICATIONS DU SERVICE DES LECTEURS DE L’UEPAL

Ces prédications sont fournies par le Service des Lecteurs de l’UEPAL.

Ce service a été dirigé par le pasteur Georges HUFFSCHMITT de Wingen-sur-Moder
puis 67290 VOLKSBERG (tél O3.88.01.55.41, courriel: g.hufschmitt@wanadoo.fr),
jusqu’en 2009.

A partir de cette année 2010, Mme Esther LENZ, de 67360 MORSBRONN-LES-BAINS
(tél: 03.88.90.07.02, courriel: esther.lenz@wanadoo.fr) reprend la direction.

Le Secrétariat est assuré par Madame Suzanne LOEFFLER,
au Secrétariat de la Paroisse de 67340 INGWILLER
(tél: 03.88.89.41.54, courriel : Suzanne.Loeffler@orange.fr).