2009. 12 : 12e Dim après la TRINITE

Dimanche 30 aout 2009

S’ouvrir à l’écoute et au témoignage.

Marc 7,31-37

« Effata – ouvre-toi », cette injonction de Jésus pourrait résumer cette histoire qui, dans l’évangile selon Marc, occupe une place bien choisie. Elle s’adresse tout particulièrement à ceux qui sont fermés, autrefois comme aujourd’hui. Suivons un peu cette histoire.

1.    Une guérison à forte portée symbolique

L’évangéliste Marc place cette guérison entre les deux multiplications des pains qu’il raconte. La première symbolise l’action de Jésus pour le peuple juif, la seconde son ouverture vers les païens . Jésus lui-même fait le pas vers les non-juifs pendant la rencontre avec la femme cananéenne qui, malgré les paroles blessantes que lui adresse le maître, insiste pour qu’il guérisse sa fille. La guérison elle-même se passe en territoire non juif, ou au moins à la marge de la « terre sainte ».

L’évangile selon Marc évoque ainsi un tournant dans le ministère de Jésus: les païens peuvent avoir part au royaume de Dieu, il n’est pas  seulement réservé aux juifs.
Dans le processus de la guérison lui-même, relevons quelques traits importants.
Tout d’abord, Jésus se veut discret. Il opère loin de la foule et demande à l’homme guéri de ne pas parler de sa libération. Par la suite, on constate cependant que cette discrétion n’est pas respectée, bien au contraire.

Deuxième aspect : le contact physique est important. On demande à Jésus d’imposer les mains. Il touche les oreilles du sourd-muet avec le doigt et sa langue avec la salive. On peut y voir les rites des guérisseurs. Nous pouvons aussi comprendre qu’il ne veut pas de relation virtuelle, comme le sont devenues beaucoup de relations modernes : pour que quelque chose se passe, il faut une sorte de corps à corps avec le souffrant. Le contact est réel et efficace pour guérir.

Troisième aspect : Jésus lève les yeux vers le ciel et pousse un soupir avant de dire « ouvre-toi ». Jésus n’agit pas seul, il s’adresse au Père céleste pour que quelque chose se passe. Ce qui doit s’ouvrir, ce sont les oreilles fermées, la langue prisonnière et, peut-être l’homme replié, refermé sur lui-même. Le soupir avant la guérison montre aussi que Jésus est constamment ouvert à l’action de Dieu, cela exactement au moment, où il s’ouvre lui-même au monde qui l’entoure, au-delà des frontières ethniques et religieuses établies.

2.    Autisme religieux

Il est possible que cette histoire ait été placée à cet endroit par l’évangéliste Marc pour répondre à un problème très particulier : celui de la fermeture, la fermeture des oreilles qui entraîne la paralysie de la langue et l’impossibilité du témoignage.
On pourrait appeler cela l’autisme religieux.

Les recherches actuelles sur l’autisme le définissent comme une impossibilité à communiquer. Cela commence dans l’enfance. Comme le sourd-muet du récit, l’enfant autiste ne peut pas répondre aux sollicitations de son entourage parce qu’il ne les perçoit pas vraiment. Il faut une longue et patiente rééducation pour lui apprendre à regarder et à entendre sans peur. Peu à peu il pourra comprendre et s’exprimer, il pourra entrer en relation avec son entourage.

Il existe un autisme spirituel et religieux chez ceux qui refusent d’entendre et de voir, qui se replient sur leurs propres problèmes et certitudes et deviennent imperméables à ce qui vient vers eux, que ce soit pour les stimuler ou pour les mettre en question. Cela peut toucher des personnes et des communautés.

Au temps de Jésus, les communautés juives disséminées à travers le bassin méditerranéen étaient missionnaires, ouvertes sur le monde, et attiraient nombre de croyants. Les communautés juives de Palestine en revanche étaient dominées par des partis religieux rigoristes qui avaient peur de perdre leur originalité, fermaient les portes et dressaient des barrières, refusant même le contact physique avec les non juifs.
Quand Jésus touche ce sourd-muet aux oreilles et à la langue, il s’oppose à l’opinion de ces partis fondamentalistes qui, en aucun cas, ne mangeaient avec un non juif.
Le « ouvre-toi », vise, au-delà des organes de communication verbale de cet homme, le comportement des contemporains de Jésus et, par-delà, le nôtre.

3.    Nos fermetures et ouvertures

Sommes-nous religieusement et spirituellement ouverts ou sommes-nous des autistes ? La question s’adresse à chacun de nous personnellement, ainsi qu’aux paroisses et aux Eglises.

En un temps de mondialisation, où beaucoup de choses, qui allaient de soi, sont devenues problématiques, chacun court le danger de se refermer, de camper sur ses convictions sans tenir compte de ce qui se passe autour de nous. Le résultat, c’est la peur, qui nous pousse à ne rencontrer que des personnes déjà connues, issues de nos milieux, qui pensent comme nous. Le désir de fuir devant l’autre, devant l’inconnu, est un signe de cet autisme spirituel qui paralyse.

Comment parler aux autres, quels qu’ils soient, si on ne
les rencontre et si on ne les écoute jamais ?

Souvent, les responsables et les membres des Eglises et des paroisses se plaignent parce que ce sont toujours les mêmes qui s’engagent , avec le même discours et les mêmes recettes. Marc nous invite à demander à Jésus de nous imposer les mains. Il est fort possible que le Christ, par des moyens divers, nous  pousse dans un coin, nous ouvre les oreilles pour entendre des choses que nous ne voulions pas écouter, de la part de voisins, de membres de la famille ou d’étrangers. Si nous le laissons nous ouvrir les oreilles, il est possible aussi que notre langue se délie et que nous arrivions, sans nous forcer, à témoigner de cette foi qui nous anime.

Le danger de fermeture guette les églises et les paroisses chrétiennes comme il menace les autres religions. Elles deviennent alors conservatrices, se barricadent dans leurs forteresses qui abritent les trésors qu’elles gèrent avec reconnaissance, mais sans oser dépasser les frontières.

Pierre Kempf

PREDICATIONS DU SERVICE DES LECTEURS DE L’UEPAL

Ces prédications sont fournies par le Service des Lecteurs de l’UEPAL. Ce service a été dirigé par le pasteur Georges HUFFSCHMITT de Wingen-sur-Moder puis 67290 VOLKSBERG (tél O3.88.01.55.41, courriel: g.hufschmitt@wanadoo.fr), jusqu’en 2009. A partir de cette année 2010, Mme Esther LENZ, de 67360 MPRSBRONN-LES-BAINS (tél: 03.88.90.07.02, courriel: esther.lenz@wanadoo.fr) reprend la direction. Le Secrétariat est assuré par Madame Suzanne LOEFFLER, au Secrétariat de la Paroisse de 67340 INGWILLER (tél: 03.88.89.41.54, courriel : Suzanne.Loeffler@orange.fr).