2009. 04 : 4e dim après la TRINITE

Dimanche 5 juillet 2009

Soyez miséricordieux

Luc 6, 36-42

Chers amis,
On a souvent l’impression que nous sommes malades de notre bonne conscience, la bonne conscience d’être les meilleurs. En Europe, par exemple, avec notre hyperprésident, hyperprésent, hyperactif nous sommes bien sûr les meilleurs. Mais les autres pays ne voient pas ça de la même façon. Et l’idée d’une Europe devenant plus forte dans une même démarche consensuelle s’estompe…

 Et nous pourrions dire la même chose de l’église ou des églises. Aussi des églises protestantes. Nous sommes nés avec le mouvement de la Réforme au I6e siècle. C’était bien. Il fallait un grand chambardement. Nous avons été bons à l’époque, nous avons été les meilleurs ; mais est-ce que nous le sommes encore maintenant ? Ne nous sommes-nous pas durcis avec les années ; est-ce que nous avons toujours tenu notre place face à l’idéologie nazie, face à l’Apartheid en Afrique du Sud ou face à la complexité du problème irlandais. La conscience d’être les meilleurs ne nous a-t-elle pas donné une carapace d’orgueil et d’insensibilité ?

Je pourrais citer d’autres exemples dans un domaine plus familial ou professionnel : Si nous avons des responsabilités professionnelles importantes, si nous sommes en classe parmi les bons élèves pouvons – nous pour autant prétendre au monopole de l’excellence ? Les meilleurs, ne l’oublions pas, ne sont pas très aimés, pas seulement parce que les autres les envient, mais parce que l’on sent bien qu’à ceux qui se croient les meilleurs, il manque la lucidité sur eux-mêmes et la vérité sur le monde. Ils planent !

1)   Alors Jésus dans notre évangile renverse les valeurs. On pourrait penser que lui aussi il pousserait à la roue de la perfection. Oui, soyez les meilleurs ! Mais il dit tout d’abord : dans son langage imagé : « Nous sommes tous des aveugles » ;   au point de vue spirituel, bien sûr. Il aurait aussi pu dire : nous sommes tous des pécheurs. Mais attention quand nous prononçons le mot de péché, ne fourrons pas tout dans le même sac. Les infractions au Code de la route, les excès de table, les fautes d’orthographe, les oublis dans les rendez-vous, ce n’est pas exactement le péché. Ce sont, ce que les mots disent : des oublis, des excès, des fautes, des infractions, des incivilités et il faut, dans notre vie, arriver à la régler. Mais quand Jésus dit « Nous sommes tous des aveugles, nous sommes tous des pécheurs » il veut dire que fondamentalement nous sommes imparfaits, nous naviguons dans le brouillard,. Luther disait que le monde était comme un paysan ivre ; il aurait aussi pu dire un étudiant saoul ou un employé pompette.

Nous le savons nous-mêmes. Nous pensons être d’excellents parents, de bons pédagogues, et pourtant nous ressentons aussi parfois comme un mur devant nos enfants. Nous n’avons pas mal agi. Nous ressentons simplement les limites de notre action. Un maire interviewé sur son attitude face à sa récente élection disait, non sans sagesse, que dans sa position il avait de fortes chances de se mettre à dos au moins 5O% de la commune, mais qu’il continuait néanmoins avec ardeur à exercer ses responsabilités : Constat de notre imperfection, de nos limites, de nos impossibilités, de nos ignorances aussi. C’est ça : reconnaître que nous sommes tous des aveugles.

2)   Et bien sûr Dieu ne veut pas nous laisser dans ce constat d’impuissance. Et c’est pourquoi il fait dire par son Fils Jésus : Dieu est d’abord miséricorde. Pas perfection, pas premier prix de vertu, mais miséricorde. Miséricorde, voilà un mot clef qui dévoile toute une personne et tout un paysage spirituel. Nous y entendons le mot « misère »accolé au mot « cœur ». En allemand le mot, pour une fois, est tout à fait analogue : Gott ist barmherzig, er hat ein Herz, für die Armut und die Armen. Er ist selber armen Herzens. C’est encore autre chose que l’amour qui est un terme très général, c’est encore autre chose que la grâce qui souligne le côté fou de l’amour divin, c’est autre chose que la bonté, qui est l’aspect gentil, serviable de l’amour. Dieu est miséricordieux ! Gott ist Barmherzig … . und von grosser Gûte. C’est le côté « penché » de Dieu, son visage d’infirmier, son aspect    Barmherziger Samariter/Samaritain descendant de sa monture pour laver les blessures de la victime des gangsters, allongée sur le côté du chemin.

Et puisque, nous sommes jour après jour confronté à l’Islam et que cela ne se passe pas toujours bien, sachons nous souvenir ensemble que presque tous les chapitres du livre sacré musulman, le Coran, commencent par l’invocation du Dieu Tout-Puissant et miséricordieux, pas par l’affirmation orgueilleuse de soi, encore moins par l’affirmation d’un Seigneur de guerre ou de vengeance. Allah, nom arabe de Dieu pour tous les croyants de langue arabe, Allah a aussi revendiqué pour lui la Miséricorde et d’être miséricordieux.

3)  Et alors bien sûr, en toute bonne logique « soyez miséricordieux comme lui » rajoute Jésus. Sans doute n’atteindrons-nous jamais le degré de miséricorde de Dieu. Mais cela ne doit pas nous inquiéter. Laissons simplement couler en nous la source de compassion que Dieu est et qu’il place en chacun d’entre nous. Que notre vie devienne fluide à l’impulsion divine. N’ayons pas peur de ne pas être à la hauteur. Ne craignons pas d’avance l’assèchement du cœur devant les immenses défis de la pauvreté humaine. Un père de famille une mère de famille se dit aussi de façon inquiète, en attendant le deuxième ou le troisième enfant : L’aimerais-je comme le premier ? Et puis le second enfant vient, et le troisième, et à chaque fois le nouveau-né tend ses bras, cherche le sein de la maman, attend des langes et des caresses. Et la miséricorde continue à couler chez le père, chez la mère, sans fin, sans barrières, de façon débordante, généreuse !!

4)  Encore une dernière remarque : Dans la miséricorde, il n’y a pas de place pour le jugement. Cela ne veut pas dire qu’il ne faille pas dans notre société un juge qui émette des jugements pour les délits ordinaires. Cela ne veut pas dire que le savant doive limiter sa capacité de raisonner, cela ne veut pas dire non plus que chacun d’entre nous doive renoncer — ah ! surtout pas ! — à sa jugeote, à sa capacité de discernement. Entendons-nous bien : quand Jésus dit : Ne jugez pas et vous ne serez pas jugés il veut parler du  jugement dernier, du  jugement définitif, qui lui est réservé à Dieu. Nous, les croyants, les suiveurs, les disciples nous jugeons toujours avec le sens du  relatif, le sens de l’humain., nous ne pouvons pas condamner à la peine de mort, nous ne pouvons jamais définitivement fermer la porte à quelqu’un, nous sommes toujours prêts à renouer des fils cassés avec les autres et avec cette partie de nous-mêmes avec laquelle nous sommes parfois en guerre.
« Heureux les miséricordieux, car ils hériteront la terre “a encore dit Jésus. Oui, la miséricorde élargit notre petit monde à la terre entière qui devient terre d’asile et refuge de réconciliés.. Et aussi, à nous – mêmes, parfois malades d’un cœur souffrant de rétrécissement, de dessèchement. Oui, heureux les miséricordieux, car ils reprendront aussi possession d’eux-mêmes !

Michel Guerrier

¼ – Service des Lecteurs – SL – 29 – 05.07.2009 – Michel GUERRIER

PREDICATIONS DU SERVICE DES LECTEURS DE L’UEPAL

Ces prédications sont fournies par le Service des Lecteurs de l’UEPAL.

Ce service a été dirigé par le pasteur Georges HUFFSCHMITT de Wingen-sur-Moder
puis 67290 VOLKSBERG (tél O3.88.01.55.41, courriel: g.hufschmitt@wanadoo.fr),
jusqu’en 2009.

A partir de cette année 2010, Mme Esther LENZ, de 67360 MORSBRONN-LES-BAINS
(tél: 03.88.90.07.02, courriel: esther.lenz@wanadoo.fr) reprend la direction.

Le Secrétariat est assuré par Madame Suzanne LOEFFLER,
au Secrétariat de la Paroisse de 67340 INGWILLER
(tél: 03.88.89.41.54, courriel : Suzanne.Loeffler@orange.fr).