2010. 06 : 6e Dimanche après la TRINITE

Dimanche 11 juillet 2010

Vivre le baptême

Romains 6, 3-8

Dans son petit catéchisme, Luther a placé le premier verset de ce passage à la fin du chapitre du baptême, comme pour résu-mer l’essentiel de son enseignement. L’apôtre Paul parle ici de la possibilité pour quelqu’un de voir sa vie renouvelée. Suivons ce qu’il dit ici du baptême, ce que signifie la mort dont il parle et comment cela peut ouvrir le chemin vers une vie nouvelle.

Baptême

Il ne nous est pas facile, actuellement, de saisir tout le sens du rite auquel Paul fait allusion quand il dit que, dans le baptême, on est enterré symboliquement avec le Christ. À son époque, des religions dites « à mystère » pratiquaient aussi des rites où le croyant mourait symboliquement avec son dieu. Le baptême chrétien concernait alors des personnes découvrant le Christ à l’âge adulte. Il se pratiquait par immersion totale. Celui qui bapti-sait sauvait le candidat de cette noyade symbolique en le ressor-tant de l’eau au nom du Christ.

Avec le temps, cela a changé dans les églises européennes. La généralisation du baptême des enfants, été comme hiver, a conduit à la pratique actuelle consistant à verser un peu d’eau sur la tête du baptisé.

Certains pensent qu’il faudrait revenir à la pratique ancienne. Cela est difficile dans la situation présente et ne résoudrait sans doute rien. Il est possible que, dans une situation de plus en plus minoritaire et missionnaire, l’Église soit amenée à réviser sa fa-çon de baptiser. Mais un changement de sa forme ne résout pas la question du renouvellement de notre existence par la Parole de Dieu.
Luther était déjà conscient des limites du changement de la forme, et il a insisté sur le contenu du baptême. Dans son petit catéchisme, le réformateur ne touche pas au rite visible, il s’attache au sens même du baptême, et en deux temps. D’abord, il affirme que le problème ne se trouve pas dans la quantité d’eau ou dans le geste, mais dans la Parole de Dieu qui accompagne le rite. Ensuite, il indique que l’essentiel du baptême réside dans la vie même du baptisé, qui est invité à se plonger chaque jour dans la pénitence pour « noyer le vieil Adam » avec ses convoitises. Alors, le Christ, par sa parole, pourra faire naître un homme nouveau qui marche dans la foi et l’obéissance.

Le rappel du baptême est ainsi à la fois le rappel d’un geste symbolique de mort et de résurrection et une invitation à un re-nouvellement constant de notre façon de vivre.

Mourir

Évidemment, le mot « mort » fait peur, car c’est le pas vers l’inconnu total et la perte de tout ce que nous avons et de ce que nous sommes. C’est du moins ainsi que nos contemporains se la représentent, et ils la confient aux hôpitaux et au corps médi-cal pour ne pas la voir.
Dans l’évangile, Jésus parle de la nécessité de quitter, de perdre certaines choses, de mourir à certaines illusions pour pouvoir le suivre. À certaines époques de l’histoire chrétienne, on a déve-loppé ce qu’on appelle la « mortification », qui consistait à se faire souffrir pour dompter ses désirs. Les Églises chrétiennes n’y insistent plus beaucoup. Chez les Francs Maçons, en revan-che, un degré de l’initiation s’accompagne d’un séjour dans un cercueil, où le candidat doit réfléchir à sa propre mort pour l’apprivoiser en quelque sorte. Cette expérience est assez forte. Mais notre époque préfère parler d’épanouissement, comme si la vie était un éternel printemps, qui n’a pas besoin d’être précé-dé de l’hiver.

Pour l’apôtre Paul, cette mort n’est plus la grande ennemie, parce qu’à ses yeux elle a été pour ainsi dire « apprivoisée » par Jésus Christ sur la croix. Il écrit ici que « si je suis mis dans la tombe, un autre s’y trouve déjà, le Christ crucifié ». Je peux m’accrocher à lui pour qu’il me ramène avec lui à la vie. C’est pourquoi il peut écrire aux Corinthiens (I Cor 15,56) que la mort a perdu son « aiguillon » qui, tel l’aiguillon du scorpion, détruit celui qui en est piqué. Son pouvoir destructeur lui est enlevé.
À nouveau, Luther nous suggère que cette « mort » ressemble à ce que nos thérapeutes modernes appellent « lâcher prise ». Cela consiste à ne plus s’accrocher à ce que nous pensons posséder, à ce que nous croyons absolument devoir sauver, ce confort, cette image de soi, ces certitudes sur lesquelles nous nous raidissons, ce besoin d’exister devant nous et devant les autres. Mourir à cela, c’est utile, voire nécessaire et libérateur, pour que l’arrivée de quelque chose de nouveau soit possible.

Revivre

Car tout ce discours sur la mort est illuminé par la résurrection de Jésus Christ d’entre les morts. Nous pouvons y apercevoir deux choses. D’une part, lors de l’événement de Pâques d’il y a 2 000 ans, les disciples ont trouvé le tombeau vide et ils ont ren-contré le Ressuscité en différentes circonstances. Cela a été pour eux une grande source de consolation et de joie. Mais c’est encore un événement du passé, extérieur à nous.

D’autre part, Paul parle de l’expérience qu’il a faite lui-même : ce Christ ressuscité a fait irruption dans sa vie personnelle et l’a transformée. Ce n’est pas seulement le souvenir d’un événe-ment passé, c’est la découverte merveilleuse qu’un humain peut être habité par la puissance de l’Esprit de Dieu qui change tout.

Cette découverte est la phase active de la vie du baptisé : il se rend compte qu’il n’est plus seul dans la vie avec son pauvre esprit humain, mais il découvre en lui un cadeau : celui d’un au-tre Esprit qui l’habite.

C’est une affaire personnelle, mais elle est partagée avec les autres baptisés qui bénéficient du même Esprit, dans une com-munauté, où le pardon peut être vécu. Le passé délétère qui pollue tant de relations humaines peut y être mis à mort et ouvrir le chemin vers une communauté où le pardon, la solidarité et la fraternité peuvent être vécus réellement.

L’homme, né de nouveau par le baptême, est à la fois une personne individuelle inspirée par Dieu et une communauté où cet Esprit peut être partagé, où il devient possible de se parler, reconnaître ses torts, demander et accorder le pardon. Nous pouvons y être vrais, même vulnérables, sans craindre qu’un autre profite de ce moment où l’on se découvre pour nous faire du mal, si l’Esprit de Dieu y est présent.

Cl : Après s’être demandé au chapitre précédent comment l’œuvre du Christ, qui nous rend justes devant Dieu, peut se vi-vre dans le quotidien, l’apôtre Paul rappelle ici le baptême qui fonde de façon visible l’appartenance au Christ. Il nous incor-pore à Christ, ce qui signifie que nous pouvons être intérieure-ment renouvelés par son Esprit et que nous sommes placés dans la communauté chrétienne. On ne se baptise jamais soi-même : un autre nous baptise au nom du Dieu Père, Fils et Saint-Esprit. Le baptême promet la force de l’Esprit-Saint, la re-lation avec Jésus dont nous entendons les paroles et dont nous recevons la présence. Elle nous place dans l’immense peuple de croyants qui, dans le monde entier, rend gloire à son créa-teur. Peut-être que cette perspective permet d’accepter, en tant que baptisé, de lâcher prise au risque de perdre des choses ac-cessoires pour recevoir l’essentiel : une vie illuminée par la grâce.. Amen

                                                                                          Pierre Kempf

Lectures :

L’évangile du dimanche se trouve dans Matthieu 28, 16-20
On pourrait compléter par Actes 8, 26-40, Éphésiens 4, 1-5 ou Colossiens, 1-4

Cantiques possibles :

Recueil Arc-en-Ciel

116  J’aime mon Dieu, car il entend ma voix
417  Tu peux naître de nouveau
606  En toi Seigneur est notre espoir
610  O Jésus mon frère
617  Mon vrai trésor sur terre

¼ – Service des Lecteurs – SL – 30 – 11/07/2010 – Pierre KEMPF