2010. 08 : 8e Dimanche après la TRINITE

25 juillet 2010

8e Dimanche après la Trinité

Les fruits de l’Esprit

Éphésiens 5, 8b-14

I
   Le texte du jour que nous venons d’entendre
est précédé de quelques mots qui constituent la première partie du verset 8. Il vaut la peine de les écouter, dans la mesure où ils donnent un ton juste et un bon éclairage à l’ensemble du passage.

« Autrefois vous étiez ténèbres, maintenant vous êtes lumière dans le Seigneur ».
   Vous l’avez compris, dans ce court passage chaque mot et chaque articulation a son importance. Il est tout d’abord question d’un changement de temps. Il y a le passé et il y a l’aujourd’hui : « Autrefois vous étiez… maintenant vous êtes… ». Il y a aussi un changement de situation… voire de statut : « Vous étiez ténèbres… vous êtes lumière ». Enfin, il est fait mention de quelqu’un qui a permis le passage d’une situation à l’autre, à savoir le Seigneur qui est présenté dans l’épître comme l’envoyé du Père pour nous ouvrir le passage des ténèbres à la lumière.

   De nombreux théologiens ont été frappés par la concision et par la puissance de ce texte, qui, en si peu de mots, évoque tant de réalités véhiculées par la tradition biblique. C’est ainsi que certains d’entre eux ont même fait le lien entre ce passage biblique et un autre, qui ouvre le livre de la Genèse dans le premier récit de la création. Écoutez plutôt :

« La terre était comme un grand vide…
l’obscurité couvrait l’océan primitif…
Dieu dit : “ Que la lumière paraisse ”…
et la lumière parut ».

Dans ce passage de l’Ancien Testament, il est question de la Parole créatrice de Dieu. Une Parole qui ouvre un passage à travers le vide… à travers le désert… à travers la stérilité… à travers l’obscurité… pour conduire à la lumière.

Nous nous souvenons tous que cette lumière-là est encore différente des lumières que nous connaissons et apprécions, comme celle du soleil, de la lune et des étoiles. L’auteur du premier récit de la création ne les oublie d’ailleurs pas. Il en parle même comme d’un bienfait… mais un peu plus loin, à une autre place, comme s’il avait voulu marquer une différence entre la lumière qui nous tombe directement sous les sens, et cette autre lumière qui se donne à travers la Parole de Dieu. En nous rendant attentif à ces distinctions fondamentales, l’auteur du premier récit de la Création nous laisse déjà entrevoir ce que les autres récits des Écritures vont déployer et développer en de multiples circonstances, à savoir que pour goûter véritablement des fruits de la Création, il convient de ne pas passer à côté de la Parole de Dieu, qui donne sa véritable touche et couleur à tout ce qui vit dans le ciel et sur la terre !

C’est ce que nous rappelle aussi le Christ, quand il nous dit : « Je suis la lumière du monde… Celui qui vient à ma suite ne marchera pas dans les ténèbres… Il aura la lumière qui conduit à la vie » (Jean 8,12). Mais aussi : « Je ne suis pas seul… il y a aussi celui qui m’a envoyé » (Jean 8,12+16). Et encore : « Vous êtes la lumière du monde ».

Lumière du monde, nous ne le sommes pas par nos propres forces ou nos succès éclatants… mais nous y sommes appelés, suscités, dans la mesure où nous accueillons humblement et fidèlement la Parole créatrice de Dieu qui nous est donnée gratuitement jour après jour, comme une manne réconfortante dans nos déserts et une lumière bienfaisante et stimulante au milieu de nos obscurités.
Pour l’auteur de notre épître, la démarche est claire. C’est dans la mesure où nous accueillons la Parole de Dieu, transmise par Jésus Christ, que nous découvrons – pour notre salut – que malgré nos errements dans bien des zones obscures, le pardon de Dieu existe et un avenir nous est donné (Éphésiens 2,7) : ne sommes-nous pas « enfants de Dieu » (Éphésiens 1,7) ?
C’est dire que tout ce qui va être développé par la suite sera une invitation à saisir ce chemin de vie.

II

« Vivez comme des enfants de lumière »

Cette parole est proposée à chacun d’entre nous pour qu’elle nous accompagne au fil des jours… non pas comme une charge écrasante, mais comme une parole bienfaisante et stimulante « quand nous sommes tentés de marcher obstinément à l’ombre ! »

Cette parole, si elle nous touche, nous met en route et nous transforme ; il ne s’agit pas de l’enfermer en nous-mêmes (ce serait tout aussi absurde que de mettre une lampe sous le boisseau) ; non, il s’agit tout simplement d’en vivre et de la partager. Appelés à la lumière, nous sommes invités à témoigner librement de l’espérance qui nous anime et – chaque fois que cela se donne…, ou s’est donné – à rendre grâce pour les fruits de la lumière, reçus quotidiennement tels de précieux dons de Dieu qu’il convient de discerner, d’apprécier et d’honorer ! Notre texte en cite trois.

Le premier fruit de la lumière de Dieu s’appelle la bonté. Que faut-il entendre par là ? Certainement pas l’exhibition de nos bienfaits sur la place publique, afin d’être vus et reconnus de tous. En matière de bonté les voies du Seigneur sont plus discrètes. Ainsi, il vaut mieux que ce qui vient du cœur ne passe pas par le canal de notre comptabilité secrète intérieure, mais se passe de telle sorte que la main gauche ignore ce que fait la main droite et qu’au final le nom de Dieu soit loué. La bonté ne se décrète pas. Elle se cultive communautairement à la lumière de la Parole de Dieu et dans la joie pour tout nouveau passage de l’obscurité à la lumière.

Le deuxième fruit de la lumière de Dieu s’appelle justice. bibliquement, ce terme peut s’entendre de multiples manières… mais, dans la suite de ce qui précède, nous pourrions dire qu’il ne suffit pas – même si cela est louable – de se réjouir des signes de bonté qui témoignent de la lumière… encore faut-il tout faire, pour que celui qui, par la grâce de Dieu, a traversé cette voie qui va de l’obscurité à la lumière, puisse aussi trouver une place digne et respectable dans l’environnement qui est le nôtre. Cela passe par la reconnaissance des droits fondamentaux pour chacun d’entre nous. Vous sentez bien que nous dépassons ici le simple coup de cœur passager, pour aborder la question de ce qui doit être garanti dans la durée. C’est toute la nécessité et noblesse du dialogue civique, social et politique d’en susciter l’analyse, de dégager des propositions et de veiller aux bonnes applications, afin que justice soit rendue à ceux qui, passagèrement ou d’une manière plus longue, sont en situation de faiblesse. Au moment où la tendance se répand de tailler sévèrement dans tout ce qui coûte, veillons à faire les bons choix et démasquons derrière les communications subtiles, ce qui a pour objectif de nous enfumer, voire de nous rendre directement complice de l’injustice, en bafouant les droits les plus élémentaires. Nous savons aujourd’hui que ce processus guette toute société qu’elle connaisse l’abondance ou la pénurie.

Le troisième fruit de la lumière de Dieu s’appelle la vérité. Dans l’esprit de l’auteur de notre texte, la vérité est quelque chose qui se reçoit, s’éprouve et se partage. La vérité vient de Dieu, c’est une facette de sa lumière. Reçue dans la confiance, elle nous permet de tenir bon dans les heures difficiles, sans être tentés de nous enliser imprudemment dans la calomnie, le mensonge, l’ironie destructrice ou la rumeur diabolique. Elle nous éclaire le chemin, afin que nous puissions continuer à discerner ce qui est juste et bon, à le valoriser et à nous y tenir.

Conclusion

Vous l’aurez compris, vivre comme des enfants de lumière n’est pas un exercice de tout repos, que nous pourrions accomplir par nos propres moyens, sans nous soucier de tout ce qui nous entoure. Ne s’agit-il pas tous les jours de retrouver avec d’autres notre place dans la création de Dieu et de suivre le chemin ouvert par le Christ sous le signe de la bonté, de la justice et de la vérité ? C’est ce que nous propose l’auteur de la lettre aux Éphésiens lorsqu’il nous invite pour conclure à reprendre en chœur cet hymne baptismal :

« Éveille-toi, toi qui dors,
lève-toi d’entre les morts,
et sur toi le Christ resplendira… »
Bonne route et à la grâce de Dieu
Amen

Cantiques proposés :

Alleluia

1. 21/09,1-3       2. 36/22,1-5       3.36/13,1-3        4. 36/29,1-6

Jean ARBOGAST

¼ – Service des Lecteurs – SL – 32 – 25/07/2010 – Jean ARBOGAST