Dimanche 26 mai 2013
La sainte Trinité
Nombres 6, 22-27
Trinité
Introduction
Cette bénédiction que Martin Luther, dans sa liturgie, a placée à la fin de chaque culte, fait partie des instructions données à Israël au Sinaï. Dans les chapitres 3-8, beaucoup de passages parlent des Lévites, les prêtres. Aaron, frère de Moïse, est le premier grand-prêtre d’Israël. Le premier et le dernier verset du texte rappellent que cette bénédiction est à l’origine destinée au peuple d’Israël ; c’est donc un texte très œcuménique !
Pour garder le « style liturgique traditionnel », le texte est cité d’après la version de la « Bible à la Colombe » – on trouve facilement des termes plus actuels.
Un parallèle possible avec la Trinité : Le Père garde et protège ce qu’il a créé. Le Fils offre aux hommes la grâce par son œuvre de salut. Le Saint-Esprit met la paix dans le cœur des croyants.
Prédication
En entendant le texte de prédication, vous auriez pu croire que le culte était terminé, puisque ce sont généralement les dernières paroles avant la sortie, paroles qui nous rappellent que Dieu nous accompagne sur notre route, qu’il veut être avec nous après le culte, dans notre vie de tous les jours.
I. « Bénir » signifie « dire du bien » sur quelqu’un, lui souhaiter du bien. Lorsque c’est Dieu qui parle, il ne s’agit jamais d’une parole vide, sans conséquences. La bénédiction de Dieu est une parole chargée de puissance, par laquelle Dieu lui-même, ou un homme qui le représente, fait venir effectivement sur des personnes le salut, la prospérité, la joie de vivre. La bénédiction est d’une manière générale la manifestation de la générosité de Dieu. C’est une force de vie agissant dans la croissance et la reproduction des êtres vivants ou des plantes. Dans l’Ancien Testament, les enfants ou une bonne récolte sont des signes extérieurs de la bénédiction.
Et dans l’Ancien Testament, la bonne parole accompagnée de gestes est prononcée à diverses occasions : comme salut lors d’une rencontre ou d’un départ, aux grands moments de l’existence comme la naissance ou le mariage, et bien sûr au culte. Les Ecritures nous appellent aussi à bénir Dieu ! L’homme ou le peuple que Dieu bénit répond en bénissant Dieu, c’est-à-dire par des actions de grâces exprimant la reconnaissance. Ce qui évidemment est aussi une confession de foi, puisque l’on reconnait par là que les bonnes choses viennent de Dieu et que l’on est dépendant de lui. Oui, tout dépend de la bénédiction de Dieu (en allemand : « An Gottes Segen ist alles gelegen »). Le bonheur ne dépend pas de notre volonté, de nos efforts, du moins pas seulement ; il faut qu’autre chose s’y ajoute, qui n’est pas en notre pouvoir, qui vient de plus haut. Alors que d’autres parlent de chance, les croyants y voient la bénédiction de Dieu.
Dans notre texte, Dieu dit qu’en bénissant les Israélites, les prêtres mettront son nom sur eux. « Tu m’appartiens, je suis avec toi », dit Dieu. Et le nom de Dieu prononcé, mis sur les croyants par l’imposition des mains, est le gage de sa fidélité, comme une signature au bas d’un papier officiel engage celui qui a signé. Chez les chrétiens, c’est le signe de la croix qui peut accompagner la bénédiction. Les Catholiques et une partie des Luthériens le font systématiquement ; d’autres y sont allergiques, car cela pourrait ressembler à un geste magique ; pour d’autres encore, le signe de la croix reste exceptionnel, (comme chez nous lors des baptêmes où nous traçons le signe de la croix sur le front de l’enfant : « Reçois le signe de la croix, car désormais tu appartiens au Seigneur Jésus-Christ, le crucifié et le ressuscité » ou : « Pour toi, Jésus-Christ est mort et ressuscité. Sois marqué du signe de la croix »). Ceux qui portent la croix comme pendentif, si ce n’est pas une décoration sans signification, veulent exprimer la même chose : j’appartiens au Christ, j’essaie de vivre en disciple du Christ… La croix est le signe de la plus grande bénédiction !
II. La formule de bénédiction qui nous vient de l’histoire ancienne d’Israël comprend trois parties. Ce n’est pas à cause de la Trinité, puisqu’à cette époque on ne connaissait pas encore le Fils de Dieu et la doctrine de la Trinité formulée bien plus tard. Trois fois, il y a au début ces mots : « Que l’Eternel ». Pour éviter tout malentendu : celui qui agit ici, ce n’est pas le prêtre qui parle, mais Dieu seul ! C’est de lui seul que peut venir la bénédiction ! Le prêtre ou le pasteur qui parle n’est qu’un instrument qui transmet. Et nous nous en doutons bien, qu’une telle parole, l’ordre de bénir en son nom, ne peut être prononcée que par Dieu, une parole agissante, réalisant ce qu’elle dit. Pensons à la création : « Dieu dit… et cela fut. » Chez Dieu, la parole est déjà action. Nous, les humains, en sommes souvent très loin ; il y a une grande différence entre ce que nous disons et ce que nous faisons ; toujours à nouveau, nous constatons que nous n’avons pas les moyens de réaliser nos projets. Raison de plus pour invoquer la bénédiction de Dieu sur ce que nous voulons entreprendre.
1. « Que l’Eternel te bénisse et te garde ». La bénédiction : c’est la protection de Dieu dans notre vie quotidienne avec tous ses dangers et toutes ses menaces. La bénédiction : c’est l’accident qui aurait pu arriver et qui ne s’est pas produit. C’est la maladie vaincue, la peur qui s’est révélée injustifiée, la situation apparemment sans issue qui a connu un dénouement inespéré… La bénédiction de Dieu comme protection a beaucoup de visages ; sachons les découvrir ! Que pourrait-on souhaiter de mieux que de vivre sous la protection de Dieu ? Que pourrait-il nous arriver, si nous nous plaçons sous la bénédiction de Dieu ? – En fait, beaucoup de choses peuvent arriver, et pas seulement des choses agréables. Un accident, une maladie incurable, un échec professionnel, cela peut toucher le chrétien le plus sincère et le plus pieux. Mais est-ce que cela veut dire que Dieu aurait retiré sa bénédiction ? – Non, pas du tout ! La bénédiction n’est pas un acte magique, une assurance tous risques, une garantie totale. Je vais au culte, je prie, je reçois la bénédiction, et puis je suis à l’abri de tout malheur… Ce n’est pas cela, la foi chrétienne. Non, ce n’est pas une garantie contre tout ce qui peut arriver de pénible dans la vie. Mais en toutes choses, Dieu sera à mes côtés et il gardera mon âme. Le malheur ne me séparera pas de lui et ne m’empêchera jamais d’atteindre le but que le Seigneur m’a fixé. C’est ce que je crois fermement.
2. «Que l’Eternel fasse briller sa face sur toi et t’accorde sa grâce ». Dans cette deuxième partie de la formule de bénédiction, Dieu prend des traits humains. Un visage rayonnant nous inspire confiance, nous rassure, nous réconforte. C’est ainsi que Dieu veut nous regarder : dans la clarté et non d’une manière sombre. Ce n’est pas le regard du policier ; ce n’est pas un regard qui fait peur, mais un regard clair et franc. Le Seigneur nous regarde avec bienveillance, avec compassion, dit la Bible. Il est mon ami. Je n’ai rien à craindre ; mes fautes, mes défauts, mes échecs, mes doutes, mes désespoirs, tout cela ne le fait pas se détourner de moi. Plusieurs fois dans l’Evangile, il est précisé que Jésus a regardé ses interlocuteurs (Pierre, Zachée). Et lors de la rencontre avec le jeune homme riche qui lui demande ce qu’il doit faire pour hériter la vie éternelle ; « Jésus l’ayant regardé l’aima » est-il dit. Le visage de Dieu, c’est celui-là : il nous regarde et nous aime ; et c’est par Jésus-Christ qu’il nous l’a prouvé. Voila la grâce. Voilà la bénédiction.
3. « Que l’Eternel lève sa face vers toi et te donne la paix ». La paix : « Allez en paix ! », ce sont les dernières paroles du culte. La paix, c’est aussi le but suprême, l’aboutissement de notre cheminement vers le Royaume de Dieu. Le terme hébreu pour paix, « Shalom », signifie beaucoup plus que l’absence de conflit. Le sens de ce mot est si riche qu’il faut le traduire par plusieurs termes français : la paix, bien sûr, mais aussi la joie, la plénitude, la satisfaction, la sérénité, la béatitude… Une paix profonde possible parce que l’on se sait dans la main de Dieu. Dieu a fait la paix avec nous en Jésus-Christ, par l’événement de la croix. Il veut mettre dans nos cœurs une « paix qui surpasse toute connaissance », et nous utiliser comme instruments de sa paix. « Allez en paix » : où que vous alliez, la paix de Dieu est avec vous ; où que vous alliez, portez-y la paix de Dieu !
Demander la bénédiction, c’est une confession de foi. Nous reconnaissons que nous avons besoin de l’assistance du Seigneur. Nous avons besoin de protection, car notre vie est menacée ; nous avons besoin de grâce, car nous échouons souvent ; nous avons besoin de paix, car sans Dieu, notre cœur est sans repos.
Nous recevons la bénédiction de Dieu ; que recevons-nous ? – Pas un acte magique qui nous rend invincibles. Mais des yeux ouverts sur la vie, un cœur vaillant, le sens des responsabilités vis-à-vis de ceux qui ont besoin de notre aide. Dieu nous envoie avec une promesse et une mission : « Je veux te bénir et tu seras une bénédiction pour d’autres ». Amen.
Cantiques :
ARC 253 / 615 / 618 / 889 / 890. AL 41-08 / 47-18 / 62-78 / 62-82.
Prière d’intercession :
Seigneur, Dieu trois fois saint,
En toi se trouve la plénitude de la Vie. Comme Créateur de toutes choses, tu es notre Père qui pourvois à nos besoins. En Jésus-Christ, tu es devenu notre frère qui nous révèle ton amour. Par ton Saint-Esprit, tu es proche de nous et tu nous unis dans la communion de ton Eglise.
Souvent nous sommes ingrats et nous ignorons les signes de ta bénédiction qui nous accompagne tout au long de notre existence. Dans ta grâce, tu ne nous retires pas ta présence. Nous te louons pour ta miséricorde et ta fidélité.
Nous te prions de nous donner la force et le courage de résister à tout ce qui porte atteinte à la vie. Eclaire-nous par la lumière de ta vérité, pour que nous soyons des témoins crédibles de la bonne nouvelle pour tous ceux que nous rencontrons.
Nous te prions pour les cercles de nos paroisses et de nos Eglises qui essaient de vivre et de transmettre ton amour pour les humains, proches ou lointains. Fortifie leur unité et leur désir de te servir en suivant l’exemple de ton Fils Jésus-Christ.
Nous te prions de nous accorder ton Saint-Esprit, pour que nos yeux et nos oreilles soient ouverts pour reconnaitre les besoins des personnes solitaires, malades, déprimées, accablées par des problèmes personnels, familiaux ou professionnels ; et que nous trouvions les paroles et les gestes de réconfort et d’espoir.
Denis Klein, pasteur à Offwiller.