QUI VEUT, POUR LES HEROS DE LA GUERRE (August Bercht 1838) Wer könnte jedem der Helden alle

QUI VEUT, POUR LES HEROS DE LA GUERRE
                Wer könnte jedem der Helden alle

                      August Bercht, 3 février 1838

1. Qui veut, pour les héros de la guerre
    Qui, en ces journées
    On conduit l’armée,
    Lever le verre
    D’un vin de fête,
    Et, redressant la  tête,
    « A l’honneur ! » boire ?
    Vaincu par le fils du Rhin, qui le guette,
    Il tombe à terre !

2. Oui, grande est la moisson de gloire
    Depuis Grossbeeren,
    L’endroit où les Français ravalèrent
    Leur orgueil, Nollendorf et Kulm,
    Qui leur fit oublier les succès d’Ulm,
    Depuis qu’aux rives de Bach-Katzen
    Un gros lion les a pris dans ses pattes,
    Depuis qu’à Dennewitz, le fameux Dennewitz,
    L’éclair vengeur les a frappés au vif !

                                   *

3. Mais dans ce grand chœur de héros
    Trois noms se dressent plus haut,
    Trois noms d’un authentique renom,
    Immortels de gloire par leurs actions.
    D’abord Scharnhorst, le silencieux stratège,
    Qui pensait les combats comme un sage.
    Il a dessiné un à un les cercles,
    Anneaux magiques,
    Organisé la perte
    De l’Ogre. Alors l’armée,
    Au bon endroit
    Et sous son roi,
    Put sauver l’honneur bafoué
    De la patrie. Mais après le combat
    De Lützen, où son examen se passa,
    Il partit au ciel pour annoncer aux braves
    Que les jeunes se battent  et savent
    Mériter, par leur sacrifice,
    D’être de Prusse.

                                  *

4. Fier, passe au galop, sanglante tempête,
    Pour infliger aux Français la défaite,
    Le pousseur, le marcheur,
    Notre vieux Blücher, qui hait les potaches,
    Leur encre, leurs taches ;
    Maréchal, qui pourtant prit la plume,
    A l’épée écrivit de sa paume
    Une page claire et sans fable :
    Sa plume d’acier était son sabre,
    Son papier blanc était la campagne
    De la Silésie à la Champagne.
    D’une encre rouge,
    D’un sang pourpre,
    Il écrit l’effrayant rapport
    De tous ces morts
    Qui ci-gisent,
    Pour qu’en mille ans encore on le lise.
    Pour signature à la fin,
    Notre grand héros
    Sur le Montmartre a placé un grand point
    Qui rendit au monde le repos.

5. Ayant conquis la gloire aux cieux,
    Il se couche sur son cuir paresseux ;
    Mais le Corse se relève,
    Etendant l’aile d’acier de l’aigle.
    Le héros se lève de son lit,
    Et court vers le lieu du conflit.
    On entend rugir, cracher la mitraille,
    Le bruit sourd des chevaux qui dévalent,
    Sauvage ruée des cavaliers.
    Le héros attend l’instant dernier,
    Quand il pousse le cri : « En avant ! »
    Ce puissant mot,
    Il se dresse à cheval,
    Lui, le héros,
    Et, les yeux tout remplis de larmes,
    Le saluent ses compagnons d’armes.
    Les Prussiens n’auront pas attendu longtemps
    Pour essuyer de leurs sabres tout le sang,
    Ni  plus pour tourner la page
    Et laver du sang leur visage :
    Dans la nuit, lorsque tant de pluie fut tombée,
    Le cri : « Formez les bataillons !
    Les hussards, les dragons,
    Tous à vos coursiers ! »
    Du Katzbach arrive à votre aide l’allié !

6. A Waterloo tonnent les éclairs.
    Sir Wellington, assis en plein air,
    Lorsque s’entend plus proche le bruit,
    Dit : « Je voudrais que vienne la nuit,
    Ou qu’arrive, selon sa promesse,
    Blücher et l’armée de Prusse. »

7. A peine a-t-il dit ces paroles,
    Que les Prussiens marchent, caracolent,
    Avalanche
    Qui déclenche
    Les gueules brûlantes des serpents de bronze,
    Crachant la mort,
    Qui s’enfonce
    Dans les rangs des forts,
    Ennemis qui s’affolent
    Et en désordre, ahuris, détalent,
    Paniqués,
    Fuyant le champ, le souffle coupé.
    Alors le maréchal dit à l’ami :
    « Entre tes mains, les voilà remis ! »

                             *

8. De ces trois, qui est le troisième ?
    En va-t-il avec lui de même ?
    Le troisième héros de ces Prussiens
    Le voici :  Neidhart von Gneisenau.
    O Gneisenau, Gneisenau, le vaillant !
    Comment à cheval tu courais dans le champ,
    Comment tu les chassais au trot
    Et les dispersais au galop !
    L’amie des fourbus, la tranquille nuit,
    Sans leur donner son repos a fui.
    Et quand des chevaux, à terre descendus,
    Ils se cachèrent,
    La lune dit :
    « Je suis l’alliée des Allemands
    Je suis leur lumière ! »
    Alors ils fuirent de près, de loin,
    Mais de repos, ils n’en trouvèrent point.

9. En une nuit, le grand œuvre fut accompli.
    En cette nuit,
    Où toi,
    Qui hais la paix,
    Fus chassé de vile façon,
    Napoléon !
    Là s’effondre dans les flammes
    Ton trône d’or et de larmes.
    Là, le Seigneur des batailles dit :
    « Le peuple allemand s’y est bien pris !
    Il faut au centre de l’Europe
    La langue allemande et son peuple :
    Il doit durer
    Tant que le monde va exister ! »
 

BERCHT, Auguste, né le 30 juillet 1790 à Niederwarbig, près de Treuenbrietzen, combat en1813 dans le corps franc de Lützow, devient rédacteur de la « Bremer Zeitung – journal de Brème », puis le « Rheinischer Beobachter– L’observateur du Rhin ». Il meurt à Darmstadt en 1861.