TU PORTES L’AGE DE TRENTE ANS (Karl von Holtei) Schier bist du dreissig Jahre alt

TU PORTES L’AGE DE TRENTE ANS
             Schier dreissig Jahre bist du alt

                            Karl von Holtei

1. Tu portes l’âge de trente ans !
    Tu m’as accompagné,
    Tu m’as protégé comme un frère.
    Sous le canon, le tonnerre,
    Jamais nous deux n’avons tremblé.

2. Nous dormions dans la froide nuit,
    Jusqu’à la peau mouillés.
    Tu as ranimé mon courage.
    Quand l’effroi me serrait la gorge,
    A toi, manteau, je l’ai confié.

3. Tu n’étais pas d’un grand bavard.
    Présent mais silencieux,
    Toujours tu m’as été fidèle.
    Je ne reprise pas tes ailes :
    Tu serais neuf, mon vieux !

4. Car même si tous me moquent,
    Pour moi tu vaux de l’or.
    Là où nombreux tes lambeaux pendent,
    Les balles, déchirant des bandes,
    Ont accroché tous ces décors.

5. Quand la dernière balle vient
    Dans mon cœur de Prussien,
    Manteau, je veux qu’avec toi on m’enterre,
    Qu’en toi on me mette en la bière,
    Qu’en toi on m’enroule bien.

6. Nous dormirons ensemble
    Jusqu’au jour de l’appel,
    Le grand jour où Dieu me ressuscite,
    Le jour glorieux qui nécessite
    Mon manteau immortel !
   
   
   
         Texte        Schier dreissig Jahre bist du alt (Wallheim) 1828
                          Karl von Holtei (1798-1880)
           dans       Auswahl Deutscher Gedichte im Anschluss an
                          die  Geschichte der deutschen National Literatur

                          von Professor Dr. Hermann Kluge,12. ,
                          verbesserte und vermehrte Auflage
                          mit zahlreichen Porträts in Holzschnitt
                          Altenburg, Verlag Oskar Bonde, 1908, page 78
                          fr. : Yves Kéler, 25.11.2010

HOLTEI Karl von: Né le 24 janvier 1798 à Breslau, fils d’un officier de hussards. Il fut volontaire dans l’armée prussienne en 1815. Après des études de droit, il s’orienta vers le théâtre et écrivit « Die Wiener in Berlin – Les Viennois à Berlin » (1824) et « Die Berliner in Wien – Les Berlinois à Vienne » 1824, deux pièces qui eurent un grand succès. Il a introduit le vaudeville à la française en Allemagne. Il a aussi édité trois recueils de poèmes : « Schlesische Gedichte – Poèmes de Silésie » (1830) ;  « Gedichte – Poèmes » (5e éd. 1861) ; « Stimmen des Waldes – Voix de la forêt » (2e éd. 1854). Il mourut au couvent des Frères de la miséricorde à Breslau, le 1é février 1880.