UN GARS TRAVERSE LE PAYS
Ein Knabe wandert über Land
Konrad Ferdinand Meyer 1825 – 1898
1. Un gars traverse le pays,
Vêtu d’un sombre et simple habit.
L’orage au ciel se masse noir ;
Il presse le pas, c’est le soir.
Tout près de lui l’éclair s’abat,
Presque à ses pieds, tout juste à ras.
C’est le baptême ardent du feu
Pour l’étudiant manqué de peu.
2. Cellule étroite du couvent :
Tu vois le moine ici priant.
S’exerçant à la moinerie,
Aux œuvres pour son paradis.
L’oiseau lui parle en ce tombeau :
« Martin, regarde, il fait si beau !
Je vole dans les airs si bien :
Dieu par sa grâce me soutient ! »
3. C’est à Augsbourg que le légat
Affronte, dans un grand débat,
Lui, le prélat, instruit, savant,
Un petit moine à l’œil perçant,
Dont le regard tout enflammé
Fait dire au cardinal ganté :
« Cet homme est comme le démon ! »
Aurait-il peur qu’il ait raison ?
4. Mais, sous les murs de Wittenberg,
Le moine avance, c’est l’hiver.
La flamme monte dans le vent ;
Il jette en ce feu dévorant
La bulle, comme ce serpent
Que Paul secoue d’un mouvement.
Sur l’Allemagne va briller
Un feu nouveau de vérité.
5. A Worms, Luther, très franchement,
A l’empereur dit hardiment :
« La Parole est la vérité.
Le Concile et la papauté
N’enseignent pas que le salut
Nous vient du seul Seigneur Jésus.
Par la Parole ici lié,
Je ne peux pas me rétracter ! »
6. Empereur Charles-Quint, tu crois
Que Luther ne fait pas le poids !
Pour l’amour et pour le devoir,
Pour la force et pour le savoir,
Par sa puissance et par sa mort,
Luther partage notre sort.
Trop tôt tu l’avais enterré :
Tu croyais son cas terminé.
7. Dans « un rempart », dans son pays,
Martin Luther a été mis.
Là il traduit, et puissamment,
En allemand le Testament.
« Où as-tu pris, les mots, Docteur,
Pour dire avec tant de vigueur ?
— Du peuple je les ai appris,
Sur ses lèvres je les ai pris. »
8. Très clair fut son enseignement,
Et lumineux, rafraîchissant :
La foi, Dieu la fait naître au cœur,
L’espoir est en Christ, seul Seigneur.
Les œuvres de la vanité
Par l’Esprit saint sont rejetées.
Chacun fidèle restera
S’il croit que Dieu le sauvera.
9. Les cœurs bondissent, pleins de joie,
Les cloches sonnent sur les toits.
Tous au village, en la cité,
Chantent son hymne avec gaîté :
« C’est un rempart que notre Dieu ! »
Disent les jeunes et les vieux ;
« Avec Dieu nous serons vainqueurs ! »
Chantent le peuple et l’empereur,
Texte Ein Knabe wandert über Land
Conrad Ferdinand Meyer, 1825-18898
dans Auswahl Deutscher Gedichte für höhere
Schulen, Theodor Echtermeyer, 34. Auflage
1903 (1. 1836), 978 Seiten
Halle, Verlag des Waisenhauses, page 285
et Auswahl Deutscher Gedichte im Anschluss an
die Geschichte der deutschen National Literatur
von Professor Dr. Hermann Kluge,12. ,
verbesserte und vermehrte Auflage
mit zahlreichen Porträts in Holzschnitt
Altenburg, Verlag Oskar Bonde, 1908, page 378
fr. : Yves Kéler, 15.07. 011, Bischwiller