CAREME
PASSION
AMOUR DE JESUS
ENTERREMENT
L’AGNEAU DE DIEU VA DE BON COEUR to
Ein Lämmlein geht und trägt die Schuld
Révision de LP 124
1. L’agneau de Dieu va de bon coeur
S’offrir pour les coupables,
Et porter d’un monde pécheur
Les péchés innombrables.
Il va, fléchissant sous le poids,
Se laisse clouer sur la croix
Sans nulle résistance,
Lié , meurtri, blessé, mourant,
Et jusqu’au bout persévérant
Dans son obéissance.
2. Christ est l’Agneau, pur et parfait,
Que l’amour nous accorde.
Le sacrifice qu’il a fait
Nous vaut miséricorde.
A nos yeux quel prodige, ô Dieu !
Quel amour attire en ce lieu
Ton Fils, ton aimé, Père ?
Amour plus puissant que la mort,
Tu mets au tombeau un Dieu fort,
Qui fait trembler la terre !
3. Ce grand amour pour les humains
Le conduit au martyre ;
L’amour lui perce pieds et mains,
L’amour fait qu’il expire.
Son corps succombe à la douleur,
Son sang s’échappe de son cœur
Et de toutes ses veines !
Seigneur Jésus, de quel retour
Pourrais-je payer ton amour,
Qui paraît dans tes peines ?
4. Ton amour renouvellera
De jour en jour ma flamme.
Au monde rien n’effacera
Ton portrait de mon âme.
Sois le partage de mon cœur :
Quand il défaillira, Seigneur,
Sois ma force et ma vie !
Et puisque tu mourus pour moi,
Fais-moi, Jésus, vivre avec toi
En parfaite harmonie !
5. Je veux célébrer nuit et jour
Ton sanglant sacrifice,
M’abandonner à ton amour
Me mettre à ton service.
Tant que mes jours s’écouleront,
Malgré ma faiblesse, ils seront
Consacrés à ta gloire.
Grave en mon cœur tous tes bienfaits :
Que leur souvenir, à jamais,
Reste dans ma mémoire.
6. Par ta faiblesse je suis fort,
Ta honte fait ma gloire.
Ta pauvreté fait mon trésor,
Ton combat ma victoire.
Ton infamie fait mon honneur,
Ton épuisement ma vigueur,
Ta soif me désaltère.
Ta faim devient mon aliment,
Ta nudité le vêtement
Qui couvre ma misère.
7. Dans ta mort, Christ, mon Rédempteur,
j’ai retrouvé la vie.
Par tes blessures, ta douleur,
Ma pauvre âme est guérie.
Par tes fatigues, par tes maux,
Tu me procures le repos,
Et ton sang m’obtient grâce.
Tu fus étranger en ces lieux :
Je deviens citoyen des cieux,
J’ai près de toi ma place.
8. Qu’aurais-je à craindre de la mort
Quand ton sang fait ma vie,
Quand ta croix me conduit au port
Où je me réfugie ?
Plus le danger est près de moi,
Et plus je me tiens près de toi :
Je connais ma faiblesse !
Ton flanc percé me cachera :
Quel pouvoir donc m’arrachera
De cette forteresse ?
9. Quand viendra l’heure et le moment
D’aller devant ton trône,
Ton sang sera mon vêtement,
Ma pourpre et ma couronne !
Jésus, fidèle Emmanuel,
Présente au Père, dans le ciel,
Mon âme pécheresse ;
Puis pare-la de ta beauté,
Donne-lui place à ton côté,
Pour te louer sans cesse !
Texte : L’agneau de Dieu va de bon cœur
Anonyme
LP 124, str 1, 3, 4
Recueil luthérien Paris-Montbéliard-
Strasbourg, 1923 : 79, str 3 et 5
Cantate Bouxwiller 1939 20, str 2
rév: Yves Kéler 1985
Source commune :
Un saint agneau va de bon cœur
Cantiques Spirituels de Strasbourg 1758/1808
Supplément local p 21
D’après » Ein Lämmlein geht «
De Paul Gerhardt 1647
RA 66, EG 83
Mélodie: An Wasserflüssen Babylon, Ps 137
Wolfgang Dachstein 1525/1526
RA 66, EG 83
Frs: L’agneau de Dieu va de bon coeur
LP 124
Tu vins , Jésus, pour partager
NCTC 188, ARC 456, ALL 33/04
Pour le texte original de Wolfgang Dachstein,
qui a donné son nom à la mélodie:
« An Wasserflüssen Babylon « , Ps 137
voir sous section: chants allemands
An Wasserflüssen Babylon
Le texte
L’original allemand
L’original est le texte de Paul Gerhardt, de 1647, » Ein Lämmlein geht und trägt die Schuld « , sur la mélodie du Psaume 137 « An Wasserflüssen Babylon – Près des eaux du fleuve de Babylone « , de Wolfgang Dachstein 1525
C’est une évocation de la marche du Christ vers sa mort, comme l’Agneau sacrifié. Les traits du bouc émissaire apparaissent nettement. Gerhardt a introduit un dialogue entre le Père , qui ordonne, et le Fils, qui obéit. Il reprend là le procédé que Luther avait développé dans » Nun freut euch, lieben Christen gmein – Mes frères, louez le Seigneur » (voir sur ce site sous ce nom). De fait, Luther et Gerhardt reprennent le style de la balade narratrice, caractéristique de la fin du Moyen-Age.
Le texte exprime la mystique luthérienne, très profondément : l’attachement au Christ, qui nous fait bénéficier des fruits de sa mort, et la louange de ce Christ, si proche de nous en même temps qu’il règne au ciel. Le chant est d’une remarquable facture poétique, que la traduction proposée en français transpose convenablement.
Les sources et la traduction
Le texte français est une traduction dont l’original a paru dans les Cantiques Spirituels de Strasbourg de 1758, dans le » Supplément local » de 1808. Le Recueil luthérien de Paris-Montbéliard de 1923 en donne quatre strophes. Le » Cantate » de Bouxwiller 1939 en donne aussi quatre, mais une diffère.
Les textes ne se correspondent pas clairement de strophe à strophe, ce qui indique que diverses corrections ont été entreprises.
D’une part, le texte français de Cantiques Spirituels donne 9 strophes, alors que le texte allemand de RA 152 et EG 1995 n’en donne que 7. Albert Knapp1837 donne 9 strophes, mais la concordance n’est pas complète, et les strophes françaises et allemandes ne sont pas dans le même ordre. De plus, il semble que les deux strophes 4 et 7 de Knapp soient des interpolations, que RA et EG ont éliminées. La strophe 4 de Knapp est poétiquement lourde et ne correspond pas à la maîtrise poétique de Gerhardt. Elle est un commentaire de la strophe 3. Mais le traducteur devait la connaître, car il reprend l’image de » Herz und Adern – cœur et artères » dans sa 3ème strophe : » Son sang s’échappe de son cœur, Et de toutes ses vaines « . De même pour la 7e strophe. Celle-ci développe le rejet de ce monde, dont Gerhardt ne parle pas. La phrase : » Weg mit den Schätzen der Welt Und allem, was dem Fleisch gefällt- Au loin les trésors de ce monde Et tout ce qui plaît à la chair « , est certainement une citation de » Jesu, meine Freude » de Johann Franck, str 4 et 5 : » Weg mit allen Schätzen Au loin tous les trésors « , phrase qui fait partie de la culture générale allemande. Quel texte avait le traducteur ? Celui que donne Knapp, ou un autre ?
D’autre part, il semble que le premier traducteur a traduit plus librement certaines parties. Sa strophe 2 est une combinaison de 2 et 3 de l’original. Deux hypothèses sont possibles : soit l’auteur a développé les parties qui lui plaisaient, au détriment des autres, soit certaines strophes ont une autre source, et on aurait alors-être mélangé les strophes de deux traductions de chants différents. Par exemple, les deux très belles strophes 6 » Par ta faiblesse je suis fort « , et 7 » Dans ta mort, Christ, mon Rédempteur » : elles sont données par les trois sources modernes : Rec. Paris-Montbéliard, Cantatee 1939 et LP 1938. Elles figurent dans le texte des Cantiques Spirituels, mais ont été fortement modifiées. Pourtant, elles semblent avoir leur racine dans la strophe 8 de Knapp (= 6 de RA et EG). Leur style est différent du reste de l’oeuvre: la remarquable suite d’ antinomies qu’on y trouve leur est particulière. Mais cela n’interdit pas un même auteur. Il faudrait se livrer à une étude méthodique des livres de cantiques sur deux siècles pour tirer cela au clair.
La répartition des strophes des divers livres est la suivante :
Knapp RA EG CantS ParisM LP Cantate
1. L’agneau de Dieu 1 1 1 1
Ein Lämmlein geht 1 1 1
2. Jésus, c’est lui 2 – – 2
Das Lämmlein ist 2-3 2-3 2-3
3. Ce grand amour 3 – – –
Mein Lebetage 4-5 4 4
4. Ton amour renouvellera 4 – – –
Mein Lebetage 5 4 4
5. Je veux célébrer 5 – – –
Ich will von deiner L. 6 5 5
6. Par ta faiblesse 6 3 2 –
? Das soll und will ich 8 7 7
7. Dans ta mort, Christ – 2 3 3
? Das soll und will ich 8 6 6
8. Qu’aurais-je à craindre 8 – – –
? Komm, armes Herz 7 – –
9. Quand viendra l’heure 9 4 – 4
Wenn endlich 9 7 7
le texte donné ici
J’ai adopté ici une combinaison des strophes des Cantiques Spirituels et des livres du 20e Siècle. Cela aboutit à un texte de 9 strophes, mais dont l’ordre ne correspond pas exactement au texte allemand actuel de RA et EG, ni à celui de Knapp. L’ensemble est néanmoins équilibré
La mélodie
Elle est de Dachstein, destinée au Psaume 137. Ce chant est un des nombreux Psaumes que les luthériens traduisirent très tôt. Luther lui-même en publié quatre en 1524. Le Ps 137 de Dachstein est de 1525. Or les premiers Psaumes réformés de Calvin ne paraîtront qu’en 1529 à Strasbourg.
La mélodie est ample et longue, sur un texte de 10 vers. Elle rappelle les mélodies des Psaumes de Luther, qui ont la même caractéristique. La mélodie se termine par une belle fleur, qui exprime le sentiment de joie profonde, et qu’il laisser se développer selon son rythme. Il faut faire attention à un point : les chanteurs français sont peu habitués à ces fleurs, Calvin les ayant proscrites, et ont quelque difficulté à les rendre. De ce fait, LP avait coupé la fleur. NCTC, ARC et ALL l’ont rétablie avec raison.
L’emploi du chant
Ce chant est d’abord un chant de la Passion, destiné à la Semaine Sainte. Mais sa partie interne, les versets 4 à 7, est une méditation personnelle de la mort du Christ à ma place. Ici, on est dans le thème : Amour de Jésus. Les deux dernières strophes visent directement la mort et l’enterrement : en les combinant avec les strophes 5 et 6, on obtient un excellent chant d’enterrement en 4 strophes, destiné plus particulièrement au temps de la Passion.
La répartition du chant pour son emploi peut être la suivante :
L’Agneau et son œuvre : str 1 à 3
L’amour du Christ : str 4 à 7
La mort et l’enterrement str 5 à 7